Pirates!
Une histoire de famille
L'histoire de Sid Meier's Pirates! est simple : alors que vous n'étiez encore qu'un morveux, dernier-né d'une famille de grands bourgeois des Caraïbes, un concurrent socialement supérieur a mis aux fers toute votre famille. Vous seul avez pu vous échapper. Vous voici devenu un sale prolétaire, un vulgaire matelot. Mais attention, vous vous y connaissez en lutte des classes : à la première mutinerie venue, vous prenez le contrôle du navire et tentez l'impossible pour retrouver votre famille, la réhabiliter et surtout pour remonter l'échelle sociale. Eh oui, c'est totalement inintéressant.
À l'abordage !
Côté gameplay, vous êtes à peu près libre de vos mouvements : vous dirigez votre navire d'île en île, de ville en ville, vous pouvez piller les autres navires, devenir un honnête négociant, poursuivre le Baron Raymondo (qui sait, lui, où se trouve toute votre famille mais ne vous le révèlera qu'après moult poursuites suivies de duels) ou harceler les forces d'une puissance ennemie : le jeu propose en effet quatre camps (les Anglais, Espagnols, Français et Hollandais) et il est utile d'être affilié à au moins l'un d'entre eux. En fonction de ce que vous accomplirez pour chaque camp (et selon les relations que ces camps entretiennent entre eux), vous recevrez diverses distinctions militaires qui augmenteront votre prestige et vos chances de coucher avec la fille d'un gouverneur.
Pour ce faire, il vous faudra lui offrir des cadeaux, subir plusieurs - pénibles - épreuves de danse (il suffit d'apprendre par coeur une combinaison de touches, c'est assez débile), éliminer un rival en duel à l'épée et enfin aller secourir votre mie, enlevée par un vil pirate sans foi ni loi. Là encore, duel à l'épée. Ces combats sont extrêmement simples et, à moins de jouer à un niveau de difficulté très élevé, il est presque impossible d'échouer. Ou alors c'est que vous vous êtes endormi sur le clavier.
Même constat pour les combats navals : depuis le premier Pirates!, tout a été simplifié, au point que ça paraît même simpliste par moments. Là encore, vous n'avez presque aucune chance de perdre un affrontement. Outre les divers combats, la danse, la navigation en pleine mer ou le négoce de marchandises dans chaque ville, Sid Meier's Pirates! propose également deux autres phases, toutes deux liées à l'arrivée dans une ville qui vous est hostile : l'infiltration et la prise de ville.
L'infiltration dans la ville est tout bonnement ridicule : il suffit de se cacher dans des ruelles en attendant le passage d'un garde puis de courir jusqu'à la ruelle suivante. Aucun intérêt. La prise de ville ne vaut guère mieux : il s'agit d'une tentative pour recréer un jeu de stratégie. Aucune tactique n'est cependant nécessaire : il suffit d'avoir des forces supérieures à l'ennemi pour l'emporter. Et le pire, c'est qu'une fois la ville prise, vous ne pourrez pas la conserver pour vous et donc commencer un gigantesque empire, non non : il vous faudra la confier à un gouverneur de votre choix. Sid Meier's Pirates! a clairement pris le parti d'éviter tout aspect de gestion et plus généralement toute nouveauté, ce qui est un peu dommage.
Souquez ferme !
Tel quel, si l'on examine chaque composant l'un après l'autre, le jeu semble assez ridicule. Pourtant, il est loin de l'être : ses jolis graphismes le rendent plutôt agréable à jouer (même si une vilaine fuite de mémoire vous empêchera de jouer plus de dix heures de suite sans que ça commence à ramer sérieusement) et surtout, en pleine partie, il est passionnant : il y a toujours quelque chose à faire. Que ce soient des navires à couler (le rendement des chantiers navals devait être assez incroyable à l'époque), des villes à piller, des trésors à trouver, des pirates à fesser ou des membres de la famille à secourir, le brave héros du jeu n'a guère le temps de prendre des vacances (d'autant que son but dans la vie reste de devenir riche avant de prendre sa retraite).
Par contre, si l'on s'arrête d'y jouer pendant quelques jours, on n'a bizarrement guère envie d'y revenir : par rapport à son illustre et glorieux ancêtre, cette nouvelle version de Sid Meier's Pirates est trop simplifiée, trop simpliste et pour tout dire un peu artificielle.