Dead Space 3
La réponse est oui. Le jeu en apportant la preuve dès les 10 premières minutes, inutile de faire durer le suspense. Mitrailleuse à la main, il vous faudra immédiatement occire monstres et unitologues par paquets de douze : ça explose dans tous les sens, ça fait sauter des trains, ça se cache derrière des caisses. Bref, on croirait jouer à un Gears of War dégénéré et malhabile. Face à ce constat, on se dit que le jeu ne pourra que s’améliorer. Et bien, oui et non. Oui, parce que les soldats humains disparaissent assez vite pour laisser place au cœur du jeu (avant de revenir dans le dernier tiers), mais non, parce que malgré leur disparition, le jeu ne décolle jamais vraiment et on se lasse d’attendre que ça s’améliore. La faute assurément au rythme sans relief de l’action, mais surtout à un scénario vraiment « tue l’ambiance ».
Dans le premier Dead Space, un Isaac sans visage recevait des messages fantomatiques paraissant tout droit tirés de ses délires. Dans le second, la psychose d’Isaac, drogué à l’asile du coin, semblait presque donner naissance à l’invasion macabre. Certes, ça n’avait rien de fabuleux, mais l’aspect cauchemardesque de l’aventure ajoutait un certain charme au jeu. Dans le 3, le récit gagne en ampleur et s’éloigne définitivement des aléas mentaux de notre héros. On apprend tout du monolithe, de son passé et de son but. L’histoire en elle-même n’est pas si mauvaise, mais c’est surtout la façon de mener la chose qui transforme la sympathique série B SF en gros nanar débile. La méchante secte et sa horde de soldats fanatiques veulent détruire l’humanité pour la faire évoluer. C’est vrai que ça fait plus peur quand le méchant est un illuminé à lunettes incapable de coller une balle à qui que ce soit. Notre héros quant à lui, évidemment dépressif (renommé l’anti-monolithe pour l’occasion), ne veut pas intervenir. Mais sa meuf a disparu alors bon, il y va. Bordel, à deux jours de la retraite !
Dead Space 3 sera donc l’occasion d’en découvrir plus sur la psychologie des personnages de la saga. On apprend ainsi qu’Isaac est en retard sur son loyer, ou que John Carver répond à sa femme en lui disant qu’elle fait chier, oublie l’anniversaire de son gosse mais est triste quand celui-ci « joue à la guerre » pour faire comme son papa. Subtil ! Sans compter la passionnante rivalité amoureuse entre Isaac et Robert, d’une rare finesse. Jusqu’à la fin, rien ne nous sera épargné : méchant machiavélique, grands sacrifices (pour de faux), jalousie, rédemption, amour, remord et final grotesque. On attend le film de Michael Bay pour l’été 2014.
On se moque, mais le jeu ne manque pourtant pas de bonnes idées : scindé en deux grosses parties - l’une dans l’espace et l’autre sur la planète glacée – chacun de ses environnements aurait pu construire un vrai petit bijou de survival-horror. D’autant que c’est bien loin d’être moche et la bête affiche de très belles choses malgré son âge. La casse de vaisseaux et ses voyages spatiaux, ainsi que la colonie minière fantôme et son épais brouillard, auraient pu être les parfaits décors pour revitaliser le petit tripsolitaire terrifiant. L’immensité vide des lieux contraste brillamment avec les claustrophobes intérieurs des premiers Dead Space. Fouiller les camps et piller les vaisseaux remplis de cadavres aurait pu donner lieu à quelques petits scénarios originaux bien flippants. Le jeu se veut d’ailleurs semi-ouvert, avec quelques quêtes annexes, qui malgré de timides tentatives, n’arrivent pas vraiment à construire de narrations ni d’ambiances particulières. Hélas, la plupart du temps, vous traverserez les mêmes couloirs avant d’accéder à une salle finale remplie de monstres et de récompenses. Pas très motivant en termes d’ambiance. Quant à la quête principale, difficile d’avoir peur alors qu’Isaac et Robert règlent leurs comptes comme des collégiens et qu’un regard sur la salle permet de savoir si monstre il y aura.
Et du monstre, il y en a souvent, et ils ne sont pas venus seuls. Vous retrouverez toute la clique habituelle plus quelques nouveautés, mais les méthodes d’éradication n’ont pas changé. Plus nombreux, plus résistants, plus méchants, il y aura fort à faire. Problème, le xénomorphe privilégie le corps à corps et les environnements n’étant pas particulièrement grands, les combats se transforment souvent en boucherie incompréhensible forçant le joueur à abuser de la stase et de la roulade. On en vient presque à être heureux de voir nos copains de la secte faire diversion pour clarifier tout ça.
Pour dégommer toute cette joyeuse marmaille, les développeurs ont mis au point un système de craft particulièrement riche qui permet de fabriquer l’arme de ses rêves. Système à double tranchant puisque bien souvent vous n’aurez pas la moindre idée de l’efficacité de l’arme avant de la fabriquer, quitte à vous retrouver avec des engins complètements inadaptés. A l’inverse, une fois trouvé le combo destructeur, il n’y a pas énormément d’intérêt à expérimenter, vu qu’on ne peut équiper que deux armes. Autre effet pervers devant la foultitude de possibilité, il n’y a qu’un seul type de munition et on se demande bien à quoi sert un inventaire limité s’il ne contient en réalité que deux types d’items différents.
Fabriquer et améliorer ces armes n’est toutefois pas gratuit et il vous faudra trouver des pièces et des matières premières. Elles permettent également d’upgrader la combinaison ou de créer des munitions et des soins. Pour les trouver, vous pourrez utiliser des robots-charognards. Outre la possibilité d’acheter des DLC pour les améliorer, les sympathiques charognards vous offriront en plus la joie de faire des aller-retour dans les zones visitées (ou d’attendre les 10 minutes réglementaires) pour gratter un peu de tungstène. Entre les séances d’extermination de monstres et vos passages à la déchetterie, les développeurs se sont dits que ce serait une bonne idée de rajouter quelques mini-jeux ou des séquences affreuses d’escalade histoire d’épaissir la sauce pendant une bonne dizaine d’heures. On n’en demandait pas tant.