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AWAY : Où le Regard ne porte pas
Non, le FPS n'est pas un genre maudit et condamné à se repaître d'hémoglobine. Un jeu qui opte pour l'action à la première personne peut aussi bien miser sur une DA toute mignonne et un scénario blindé de bons sentiments. En tout cas c'est le pari qu'ont fait Aurélien Regard et JM Gennisson avec AWAY : Journey to the Unexpected, un titre qui promeut le pouvoir de l'amitié là où d'autres préfèrent mettre en scène des démembrements. Mais ces intentions louables suffisent-elles à en faire votre nouveau BFF ?
Si vous avez sagement fait vos devoirs et si vous révisez régulièrement vos fiches de jeux, le nom d'Aurélien Regard ne devrait pas vous être inconnu. En effet, il a officié dans les rangs du regretté studio Arkedo mais il a aussi plus récemment pondu le très chouette The Next Penelope en solo. Pour son nouveau projet, il s'est trouvé un compagnon de jeu en la personne de Jean Matthieu Gennisson, le bougre ayant déjà prouvé son savoir-faire sur Rayman Legends ou sur le tout neuf Monster Boy et le Royaume Maudit. Bref, on se retrouve avec une belle brochette créative et on était donc impatient de voir ce qui pourrait naître d'une telle collaboration. Il faut dire que sur le papier AWAY a de quoi susciter la curiosité : annoncé comme un rogue-lite à la première personne mâtiné d'éléments d'aventure et enrobé dans un look de dessin animé des années 90, le projet coche tellement de cases a priori sans rapport les unes avec les autres qu'on a envie d'en construire une nouvelle rien que pour lui.
You're my brochette-Away
Le point de départ de l'aventure n'est pourtant pas si original : on incarne un jeune garçon qui vit avec des grands parents un peu fantasques et dont les géniteurs ont mystérieusement disparus. On s'en doute, il faudra à un moment ou à un autre partir à leur recherche... L'élément déclencheur de votre quête, c'est que de gros malins ont cru bon de creuser un énorme trou dans le sous-sol de la maison. Forcément, au lieu d'appeler un maçon, vous ne trouvez rien de mieux à faire que d'aller explorer les galeries armé d'un simple petit bout de bois. Non seulement vous n'allez pas tarder à tomber sur des monstres, mais vous allez aussi déboucher sur une contrée verdoyante des plus étrange et mise à sac par une entreprise de travaux publics peu regardante sur la sécurité. Bien entendu, les travaux en question ne sont pas étrangers à tous vos malheurs et il vous faudra fouiner un peu pour en apprendre davantage.Dans un premier temps, ce qui porte réellement l'exploration, c'est tout bêtement le design très singulier du titre. Cette originalité n'est pas forcément à chercher du côté des décors. Certes, ils sont colorés et choupis à souhait, mais ils ne sont pas très vastes et restent cantonnés aux thèmes classiques que sont la clairière, la plage, la plaine enneigée et le canyon de western. Par contre, on est un peu plus marqué par le chara design des monstres et des personnages : non seulement ils se tapent des petites trognes adorables et tout en rondeur, mais ils sont aussi représentés par des sprites en 2D alors que le décor est bien en 3D. Ce choix de représentation est loin d'être anodin, il renforce l'impression de passer de l'autre côté du poste de télévision de son enfance et de débarquer dans un dessin animé.
Ce parallèle avec les animes des années 90 n'a rien de fortuit, il est même assumé dès l'intro avec un opening magistral qui joue à fond la carte des génériques de ces années là. De la même façon, si quelques musiques d'ambiance semblent juste tenir tranquillement lieu de fond sonore, les moments les plus épiques sont au contraire soulignés par des envolées plus fofolles façon japanimation. Enfin, il y a le thème qui fleure bon les leçons de morale un peu naïves propres à ce genre de contenu : non seulement il s'agit de partir à la recherche de ses parents, mais pour y parvenir il va falloir réussir à se faire des copains en route.
Hello brightness my new friend
Tout seul, votre petit bonhomme n'ira pas bien loin. Il ne dispose que d'un pauvre bâton qui, soit dit en passant, n'est pas toujours des plus pratique pour taper sur des sprites dont on peine parfois à évaluer la distance. Heureusement, vous pourrez assez vite mettre la main sur un étrange cube d'amitié, ce dernier débloquant un emplacement permettant d’accueillir un compagnon. Au maximum c'est ainsi trois copains qui pourront venir vous prêter main forte lors d'une aventure. Mais n'allons pas trop vite en besogne, avant de les recruter, il faut d'abord s'en faire des amis. En général, ça fonctionne à base de choix de dialogues : on rencontre une nouvelle tête, on choisit les bonnes répliques, et on se retrouve avec un nouveau compagnon. Si en revanche on n'a pas répondu correctement, il faudra attendre le prochain run pour retenter sa chance. Par contre, les amitiés sont pérennes, il suffit d'avoir enrôlé un personnage une fois pour qu'il vous rejoigne ensuite dès que vous retournez le voir dans une autre partie.Mais alors pourquoi faut-il s'entourer ? Tout simplement parce que quand on a un copain, on peut choisir de l'incarner : on profite alors de sa vision du monde pour le moins exotique, mais aussi et surtout de ses capacités spéciales. Chaque petit pote correspond à un pouvoir bien à part : les uns vous donneront accès à des attaques à distance, un autre vous rendra des points de vie ou vous permettra de bloquer les ennemis... Mais attention, ils ne sont pas éternels. En effet, une jauge d'énergie lié à chaque compagnon va progressivement se vider à chaque fois qu'il prend un dégât ou qu'il utilise ses capacités. Une fois qu'il est à vide, votre ami ne peut plus vous venir en aide, la seule option possible est de lui trouver un casse-dalle avant que sa jauge ne soit à sec.
Débloquer de belles amitiés n'est pas seulement une façon de faciliter les combats, c'est aussi le cœur de votre progression dans le jeu. Chaque nouveau copain vous octroie une précieuse étoile et ce sont ces dernières qui ouvriront de nouvelles zones ou des raccourcis plutôt pratiques. Il faut ainsi amasser toutes les étoiles du jeu, et donc s'être mis dans la poche tous les personnages, pour accéder enfin au boss de fin. Rassurez-vous, la tâche est loin d'être aussi ardue qu'il n'y paraît : il n'y a en tout et pour tout que huit étoiles à récolter et donc autant de compagnons à apprivoiser. On a beau retourner la question dans tous les sens, c'est peu, et c'est justement le plus gros soucis de AWAY.
Copains pour la vie trois heures
Autant le dire d'emblée, on ne considère pas qu'il faille juger d'un jeu à la pesée, il ne suffit pas d'être long pour être bon et certaines expériences courtes n'en sont que plus intenses. On pourra toujours nous renvoyer à des comparaisons hasardeuses des prix des jeux en fonction de leur contenu, mais là en l’occurrence avec un tarif d'environ 17€ on est assez loin de ce qui se fait sur du blockbuster en day one et de toutes façons on sait que les prix sont désormais soumis très régulièrement à des ristournes. Non, s'il y a un problème ce n'est pas forcément une question de durée pure, mais plutôt de rythme de jeu.Chaque partie va s'apparenter à une nouvelle run façon rogue-lite, comprenez pas là qu'on garde ses grenades et son argent quand on meurt, qu'on débloque quelques améliorations permanentes, mais qu'on recommence toujours l'aventure de zéro. Une run en entier dure un peu moins d'une heure si on ne prend pas de raccourci, notez qu'il est impossible de sauvegarder en cours de route. On va y traverser deux environnements principaux et deux donjons avec des salles préconçues mais agencées de manière plus ou moins bordélique. La confrontation finale est quant à elle juste une vaste blague. Mais en général, ce qui fait le sel de ce genre de construction, c'est la diversité des situations et des façons d'y faire face, or AWAY montre assez vite ses limites à ce niveau là.
Bien sûr, on peut apprécier le travail fourni par une toute petite équipe, on peut se réjouir de la DA colorée et des dialogues rigolos, on peut apprécier le fait que les compagnons tiennent lieu d'équipement, mais quand on en a fait le tour en trois heures et demi, on ne peut pas totalement se défaire de cette impression d'avoir parcouru une démo ou le premier volet d'un titre épisodique plutôt qu'un jeu à part entière. C'est mignon, ça pétille, mais on reste sacrément sur sa faim quand l'aventure se termine alors qu'on n'a pas eu le temps de voir venir le moindre climax.
AWAY est l'exemple même du jeu qui aurait mérité d'être porté par une plus grosse équipe. On peut apprécier sa DA acidulée et ses bonnes idées générales, mais sa construction sous forme de rogue-lite rend son manque de contenu assez difficile à digérer.