Tales of Eternia
Trois secondes et demi après le lancement du jeu, un constat se fait directement : Tales of Eternia a la classe. Techniquement, c'est parfois super limite (dès qu'il faut afficher de la 3d en fait), mais les décors sont superbes, et ce tout au long de l'aventure : très (bien) colorés, tantôt enchanteurs tantôt majestueux, on ne reste que rarement indifférent à leur beauté. Ils manquent parfois de vie, mais cela n'est honnêtement pas gênant. Ce qui l'est un peu plus par contre, c'est le character design, qui arrive à être à la fois plat et grossièrement ridicule. Les personnages de l'aventure, à deux ou trois exceptions près, sont tous stéréotypés jusqu'à l'os et on arrive à deviner plusieurs heures à l'avance le comportement de certains d'entre eux. Tout ou presque y passe : la princesse apitoyée, le jeune inconscient, le vieux sage, le roi borné, etc. Peut-être que c'était super il y a six ans, quand le jeu sortait pour la première fois au Japon, mais maintenant, même pour moi qui ne suis pourtant pas un grand consommateur de RPGs japonais, l'impression de déjà vu surgissant à chaque dialogue est frustrante. Heureusement, ils ont le bon goût d'être relativement courts et ne tournent pas autour du pot pendant des heures pour nous dire qu'au final, on ne sait rien de plus qu'au début de la conversation.
Tales of Eternia Eterniais
L'histoire souffre également de ce classicisme. Sans trop en dévoiler, vous aurez droit à la fin du monde, à un complot visant à renverser le pouvoir, à de la trahison par-ci par-là, à un « je suis ton père » (plus rigolo que dramatique d'ailleurs, tant il est téléphoné) et tous les éléments habituels d'un film du dimanche soir. Ah mais attendez, ça ne s'arrête pas là, puisque même au niveau du déroulement de l'aventure c'est tout aussi convenu. Non, vous n'échapperez pas aux éternels donjons élémentaires (feu, eau, glace, etc.), tout du moins pendant les quinze premières heures. Par la suite, tout devient bien plus intéressant. Le scénario commence enfin à démarrer et le découpage une ville – un donjon est moins évident. Quinze heures, c'est tout de même bien long pour mettre en place une intrigue un tant soit peu intéressante.
Mais malgré sa conception globale vieillotte, Tales of Eternia innove sur un point : son système de combat. En parlant des combats, il s'agit là d'une autre force du jeu. Si l'équipe du joueur est constituée en général de quatre personnages, on n'en contrôle directement qu'un seul, un peu à la manière d'un beat'em all: un bouton pour les attaques normales, six combinaisons possibles pour utiliser des coups spéciaux et des déplacements directement gérés à la croix directionnelle. Bon, ça reste bien entendu très limité par rapport aux jeux spécialisés dans ce domaine, mais le gain de rythme non négligeable apporté par cette jouabilité est bienvenu. A côté de ça, il est également possible de donner des consignes à nos coéquipiers, assez riches d'ailleurs. Qu'il s'agisse des formations à adopter en combat, des sorts à privilégier, des cibles prioritaires ou encore des ordres de gestion de la mana, pas mal de choses sont réglables. Par contre, il est regrettable que l'on ne puisse pas donner de consigne en ce qui concerne les attaques élémentaires, et si vous ne prenez pas la peine à chaque combat d'expliquer à tout le monde que non, lancer une boule de feu dans un volcan n'est pas la chose la plus intelligente qui soit, vous aurez de drôles de surprises. Enfin ce détail mis à part, l'IA ne se démerde dans l'ensemble pas trop mal malgré son manque d'initiative. Ah, autre souci : les rencontres sont beaucoup trop fréquentes. Alors certes les combats sont dans l'ensemble amusants à jouer, mais pas au point de devoir en faire tous les dix pas et c'est particulièrement barbant lorsque l'on est amené à revisiter des zones conçues pour les premiers niveaux.
De 13 à 1337 ans
Il ne faut pas forcément voir le manque d'ambition de Tales of Eternia comme un véritable défaut, car cela lui permet d'être très accessible, même pour quelqu'un ne jouant pratiquement jamais aux RPGs, et tout le monde y trouvera son compte à moins d'être vraiment allergique au genre. Tout d'abord, parce que sa finition est exemplaire : l'équilibrage est travaillé, pas besoin de faire du leveling intensif pendant des heures pour continuer à progresser dans la trame, on ne se perd pas trop dans les donjons à chercher la clé rouge, les quelques énigmes ne sont pour une fois assez bien pensées et on ne reste jamais complètement bloqué. Et bien que l'ensemble du gameplay ne soit pas follement original, ici, on avance plus pour découvrir un univers, qui malgré sa trop grande naïveté (un peu caractéristique de pas mal de RPGs), reste terriblement enchanteur. Chacune des faces constituant l'univers d'Eternia possède une identité propre et attachante et même si en seconde partie d'aventure on passe beaucoup de temps à effectuer des allers et retours entre celles-ci, cela se fait toujours avec plaisir. L'émerveillement est en particulier à son paroxysme dans les zones de transitions entre les couches, où une dimension épique apparaît très simplement, sans avoir besoin d'être soutenue par les pompeuses musiques que l'on retrouve habituellement. Et rien que pour ces quelques scènes, Tales of Eternia vaut largement la peine que l'on se lance dans l'aventure, quitte à se forcer lors d'un début laborieux.
Merci à jeuxvideo.com pour les screenshots.