TEST
Handball 21
Développeur / Editeur : Eko Software
Support : Nacon
A-t-on réellement besoin d’un jeu de handball ? Même lorsqu’on est soi-même handballeur d’ailleurs. Après tout, bien des joueurs de FIFA n’ont sans doute jamais foulé une pelouse du pied, et l’intérêt ludique d’une simulation de sport dépasse de loin l’unique envie de reproduire fidèlement sur l’écran un sport qu’on pratique ou qu’on aime à regarder.
Roucoulette it be
Mais il faudrait aussi être hypocrite pour prétendre que tout handballeur qu’on est, on ne rêve pas d’expérimenter la sensation grisante de s’affronter sur un écran en incarnant nos joueurs préférés et en reproduisant, du moins partiellement, le sens du jeu qu’on aime et qu’on a appris à développer. "It’s the hope that kills you - C’est l’espoir qui vous tue", comme dirait un adage anglais. L'espoir est né en 2012, dans les mains de quelques illuminés d’outre-rhin, amoureux du handball autant que du code. Neutron Games, puisque c’était eux, ont mis dans les mains de quelques heureux joueurs PC la première simulation de handball au monde, j’ai nommé : Handball Challenge. Le résultat était mitigé, le budget sans doute faible, la marge de progression, énorme.Depuis, c’est Nacon (ex BigBen Interactive) qui a repris les rênes. D’abord en éditant une nouvelle mouture développée par Neutron Games, cette fois-ci aussi sur consoles, avec IHF Handball Challenge 14 sur PS3 et Xbox 360, puis en rachetant la licence qu’ils donneront à développer à Eko Software pour deux suites, Handball 16 et Handball 17. Nacon aura donc tenté très tôt la formule annuelle qui sied si bien aux FIFA, NBA 2K et consorts. Audacieux, diraient certains. Suicidaire, diraient sans doute d’autres au regard d’une formule encore balbutiante qui ne peut se satisfaire de quelques retouches de gameplay et quelques bribes de contenu pour convaincre des acheteurs de repasser à la caisse. La version 2021 tient-elle les promesses d’un développement plus long ? Verdict, manette en main.
Au premier abord, Handball 21 présente un menu agréable à parcourir et très lisible. Les habitués auront tôt fait de repérer les modes les plus essentiels à une simulation sportive. Un mode match rapide, un championnat, la possibilité de jouer un match en ligne et un menu d’options. Enfin, on découvre trois menus dédiés à un nouveau mode sobrement appelé My Squad. On entend d’ici grincer les dents de ceux qui ont suivi l’évolution des simulations de sport ces dernières années, notamment avec MyTeam dans NBA 2K ou le plus connu, FIFA Ultimate Team pour les épisodes de la série d’EA. Autant le dire tout de suite : oui, vous allez avoir le droit à vos jolies cartes dédiées à vos professionnels préférés, on y reviendra.
Avant cela, il est temps d’aller tâter le terrain. Le premier constat est visuel. N’attendez pas de Handball 21 qu’il vous décolle la rétine à coup de gouttes de sueurs sur les visages et autres effets visuels, on est bien resté sur le moteur qui avait marqué d’un progrès l’arrivée d’Eko Software sur la licence. Disons-le tout net : c’est daté. Très daté. Plus douloureux encore, les animations sont toujours aussi saccadées et la physique de balle très sommaire. Pas de progrès de ce côté-là donc.
En attaque, la configuration des touches est restée peu ou prou la même depuis Handball 17. Une touche pour la passe, les trois autres pour les tirs normaux, à rebond et à la hanche. La gâchette droite est là pour sprinter, tandis que le déclenchement du saut se fait avec la gâchette gauche + le bouton de tir. Les boutons de tranches, eux, amèneront plus de subtilité dans les passes, avec la passe à rebond pour la gauche et une passe lobée pour la droite, et peuvent être utilisées pour interrompre un tir. Enfin, la croix directionnelle permet de lancer les différentes combinaisons dont vous disposez.
A noter qu’une pression sur le stick droit permettra d’effectuer un changement recommandé sans passer par le menu. Un ajout bienvenu correspondant bien au rythme d’un match de handball. Le changement en question se faisant probablement à poste égal, sur le joueur de champ ayant l’endurance la plus basse. On pourra bien entendu également passer par le menu pour un changement plus permanent, chose qu’on recommandera au joueur de faire après un carton rouge. Le joueur n’étant pas automatiquement remplacé après la période des deux minutes que l’on doit d’usage respecter avant de faire rentrer un nouveau joueur, on aura vite fait de l’oublier et de s’étonner de jouer à 5 pendant de longues minutes.
Chabala
Qu’en est-il alors de la défense ? Il y a bien plus de changements de ce côté-là. En effet, un œil averti aura vite constaté la présence d’un curseur se baladant le long de la ligne des 6 mètres, ainsi que l’absence de bouton permettant de permuter le joueur contrôlé. Ce système de changement de joueur hérité des autres simulations de sport et qui a été présent dans la licence Handball jusqu’en 2016, laisse la place à un système innovant : le joueur contrôle l’ensemble de la défense en déplaçant une sorte de centre de gravité, matérialisé par le curseur susmentionné. Un appui sur la gâchette gauche permet d’arrêter le curseur et de contrôler le joueur le plus proche pour effectuer des actions diverses, qu’il s’agisse d’intercepter, de bloquer un tir, de provoquer un passage en force, ou encore de pousser (sic) le jouer avec le bouton A.
Ce nouveau système constitue une des (seules) bonnes idées de cet opus pour se rapprocher du feeling d’un match de hand. Le principe d’une défense solidaire qui bouge d’un seul bloc pour voir des joueurs sortir impacter les attaquants ponctuellement représente un réel progrès, du moins en théorie. Dans la pratique, un nombre d’écueils impressionnant entache encore le bilan des mécaniques de Handball 21.
L’interaction entre attaquants et défenseurs, pour commencer, dont les errances pourraient à elles seules être résumées par un choix sémantique contestable pour l’action la plus essentielle de la défense : à savoir “pousser” avec le bouton A. En effet, si les animations et les collisions manquent clairement de finesse pour représenter efficacement ce qu’il se passe lors d’un contact au handball, Eko Software fait ici le choix de transformer vos joueurs en bumper de pinball, et ce quelle que soit la situation. On en vient à regretter les “neutralisations” du premier Handball Challenge, qui avaient le mérite de ressembler un peu plus à du handball. Non seulement ça rend toute entrée dans la défense très saccadée et désagréable d’un point de vue ludique, mais ça n’a en plus aucun sens d’un point de vue des sanctions et de ce qui est autorisé de faire au handball.
Les sanctions, parlons-en des sanctions. Si l’envie de conseiller de les désactiver nous est vite passée parce qu’elles ont le mérite de compenser le problème évoqué plus haut, en empêchant notamment d’abuser des poussettes (en multijoueur comme contre l’IA d’ailleurs), il faut malheureusement constater qu’elles ne font pas grand sens d’un point de vue des règles. Tout juste finira-t-on par comprendre qu’il faut éviter de marteler le bouton A, ou éviter de pousser un joueur en l’air, ce qui est effectivement le cas au handball, mais comme on l’a dit plus haut, “pousser” n’est pas réellement toléré d’une manière générale. En dehors de ça il sera bien difficile de comprendre les réelles raisons qui poussent nos sympathiques arbitres à prendre des sanctions sur un contact qui parait anodin, quand 30 secondes plus tard notre pivot positionné derrière la défense va littéralement se faire arracher de la zone par 3 défenseurs, dans une action qui vaudrait normalement un carton rouge à chacun, une baston générale et une intervention de l’ONU.
Tous ces éléments font de Handball 21 un jeu dont on aura bien du mal à maîtriser le gameplay. Et une fois maîtrisé, il faut bien admettre que les tactiques efficaces à mettre en place ne permettront pas de retirer une quantité phénoménale de fun lors des rencontres. L’IA y est sûrement pour quelque chose puisqu’il sera bien difficile de la mettre à mal tant elle est beaucoup plus artificielle qu’intelligente. Comprenez par là que sans être insurmontable, cette IA montrera bien rarement des faiblesses qui seraient typiques d’un comportement humain, et dont l’exploitation pourrait donner lieu à de plus nombreuses tactiques pour tromper l’adversaire. On s’étonnera par exemple de voir un temps de réaction parfait lors des pertes de balles, tant et si bien que quasiment jamais on n’arrivera à placer une contre-attaque. D’ailleurs le jeu anticipe tellement bien ce retournement de situation, qu’il en a oublié qu’un ballon renvoyé en touche par le gardien revient à l’adversaire (contrairement à un renvoi du gardien derrière la ligne de fond). Les joueurs ne se battront même pas pour la balle, le jeu semblant considérer qu’un ballon touché par le gardien rend la balle à la défense. Notons quand même une satisfaction sur le comportement dans le but des gardiens. Eux semblent bien réagir comme il faut, c’est-à-dire en se trouant de temps en temps.
À noter également que jouer à deux permet de pallier certains de ces défauts. Un humain ayant notoirement tendance à laisser des trous béants dans sa défense contrairement à cette IA peu subtile. On aura cependant bien de la peine au moment du test à trouver des joueurs en ligne. Le Steam Remote Play sera votre meilleur ami pour pouvoir jouer avec un copain distant. Si tant est que vous acceptiez le risque qu’il vous en veuille un moment de l’avoir traîné sur le jeu (NDR : Reviens Clornide ! Je le ferai plus, promis !).
My Handball Ultimate Team Squad
En dehors de l’aspect gameplay, revenons tout de même sur une des grosses nouveautés de cette édition : l’ajout du mode My Squad qui vous permet donc d’acheter des boosters contenant des cartes de joueurs des différents championnats. La méfiance est de mise tant la version footballistique de ce mode de jeu a vu son arrivée s’accompagner de pratiques douteuses liées aux micro-transactions et au caractère addictif de ces formes de lootbox. Il n’est cependant pas question de dépenser de l’argent réel pour le moment et il faut bien admettre que ce genre de mode a le mérite de s’appuyer sur l’engouement réel des compétitions officielles. Tirer des joueurs qu’on aime voir jouer sur les terrains pour les ajouter à son équipe a quelque chose d’assez grisant. Le jeu se paye d’ailleurs les licences des plus gros championnats européens, en se permettant toutefois de gros trous dans la raquette. Le haut niveau européen voit des équipes de premier ordre évoluer dans des championnats secondaires et on s’étonnera donc de l’absence de très, très grosses équipes comme le FK Vardar Skopje (Macédoine) ou Veszprém KSE (Hongrie). Leur présence aurait à elle seule justifié une catégorie “autres” tant ils sont clients réguliers du dernier carré de la ligue des champions. De même les sélections internationales sont, pour l’instant, absentes de Handball 21.
Handball 21 semble donc sans arrêt courir après ses modèles, mais constamment rater le coche en ce qui concerne l’objectif d’en faire un jeu plaisant à manipuler. C’est surtout le peu d’attention accordé à la refonte d’un gameplay dont on se lasse au bout de quelques heures qui ressort suite à ce test et l’on espère que ce sera le prochain gros chantier d’Eko Software.