TEST
Watch Dogs 2
par Nicaulas,
email @nicaulasfactor
Malgré un développement chaotique et pharaonique, Watch Dogs avait été une bonne surprise en 2014. Son open world convaincant et son gameplay plus que correct avaient fait (un peu) oublier une narration épouvantable et des enjeux rachitiques. Ubisoft oblige, le succès s’est décliné en suite où le principal changement semble être au niveau du décor : adieu Chicago et Aiden, bonjour San Francisco et Marcus. Suffisant pour mériter votre temps et votre argent ?
« Ils veulent sauver la Terre mais ils font que fumer des joints et ils puent ! Au secours ! »
Si Chicago était un terrain de jeu plutôt atypique parmi la grande famille des open worlds, San Francisco évoque bien souvent, Californie oblige, le Los Santos de GTA V. Heureusement, la crainte d’être lassé par des environnements déjà vus ailleurs est vite écartée par une ambiance foutraque alimentée par ce qui est autant un cliché qu’une réalité : San Francisco est la ville des hippies. Historiquement bien sûr, et des tonnes de chansons de la beat generation sont là pour nous rappeler qu’à San Francisco on avait des fleurs dans les cheveux, un acide dans la bouche et plusieur(e)s partenaires dans son lit. Mais aujourd’hui encore, la ville a la réputation d’être la capitale mondiale d’un certain mode de vie englobant toute l’échelle sociale, des hipsters friqués bossant dans des start-ups de la Silicon Valley aux hobos stoners en passant par des artistes contemporains et une classe moyenne écolo envoyant ses enfants chez Montessori.
Dans Watch Dogs 2, cela se traduit évidemment par des PNJ parfois loufoques (et pas seulement parce qu’ils se baladent à poil), par un character design des persos secondaires incluant cette réalité dans leurs looks –jeu déconseillé aux allergiques aux jeans slims- ou leurs activités –grapheurs, grapheurs everywhere-, mais surtout par une retranscription fidèle de la ville, y compris les quartiers les plus baba cools. Le QG local de Dedsec se trouve d’ailleurs dans une zone lourdement inspirée de « The Mission », un quartier de la ville particulièrement réputé pour son street art. Heureusement, d’autres zones de jeu plus classiques viennent contrebalancer cette surcharge de flower power 2.0. L’open world englobe des versions miniatures de la ville de San Francisco, de la Silicon Valley, d’Oakland ainsi que d’un petit bout de Marin City, le tout centré autour de la baie de San Francisco. De quoi offrir un vaste terrain de jeu surtout que, contrairement à son aîné, Watch Dogs 2 n’a pas été rempli précipitamment avec des activités annexes hors de propos.
Outre des missions secondaires jalonnant la trame principale, on trouve pas mal de missions à réaliser en coop avec d’autres joueurs, venant s’ajouter au piratage en ligne consistant à interrompre la partie de quelqu’un d’autre. Si on ajoute quelques petites features nous poussant à explorer la ville pour récupérer argent, plans de technologies ou encore points d’expérience, on obtient une durée de vie honorable. Si la trame principale peut être bouclée en moins de 20 heures en mode normal, augmenter la difficulté vous poussera à faire grimper votre héros en compétence, et donc à « farmer » technologies et XP. Pour autant, l’ensemble du contenu a gagné en cohérence et en fluidité depuis le premier épisode, notamment parce que tout est accessible depuis le smartphone et qu’il n’y a plus besoin d’escalader des relais ADSL pour débloquer les activités du quartier. Libre à vous de faire des selfies devant les hauts lieux touristiques ou de caresser des chiens pendant des heures.
Dans Watch Dogs 2, cela se traduit évidemment par des PNJ parfois loufoques (et pas seulement parce qu’ils se baladent à poil), par un character design des persos secondaires incluant cette réalité dans leurs looks –jeu déconseillé aux allergiques aux jeans slims- ou leurs activités –grapheurs, grapheurs everywhere-, mais surtout par une retranscription fidèle de la ville, y compris les quartiers les plus baba cools. Le QG local de Dedsec se trouve d’ailleurs dans une zone lourdement inspirée de « The Mission », un quartier de la ville particulièrement réputé pour son street art. Heureusement, d’autres zones de jeu plus classiques viennent contrebalancer cette surcharge de flower power 2.0. L’open world englobe des versions miniatures de la ville de San Francisco, de la Silicon Valley, d’Oakland ainsi que d’un petit bout de Marin City, le tout centré autour de la baie de San Francisco. De quoi offrir un vaste terrain de jeu surtout que, contrairement à son aîné, Watch Dogs 2 n’a pas été rempli précipitamment avec des activités annexes hors de propos.
Outre des missions secondaires jalonnant la trame principale, on trouve pas mal de missions à réaliser en coop avec d’autres joueurs, venant s’ajouter au piratage en ligne consistant à interrompre la partie de quelqu’un d’autre. Si on ajoute quelques petites features nous poussant à explorer la ville pour récupérer argent, plans de technologies ou encore points d’expérience, on obtient une durée de vie honorable. Si la trame principale peut être bouclée en moins de 20 heures en mode normal, augmenter la difficulté vous poussera à faire grimper votre héros en compétence, et donc à « farmer » technologies et XP. Pour autant, l’ensemble du contenu a gagné en cohérence et en fluidité depuis le premier épisode, notamment parce que tout est accessible depuis le smartphone et qu’il n’y a plus besoin d’escalader des relais ADSL pour débloquer les activités du quartier. Libre à vous de faire des selfies devant les hauts lieux touristiques ou de caresser des chiens pendant des heures.
La voie de son maître
Ceci étant, cette suite ne révolutionne en rien les fondements de Watch Dogs. Le principe de base reste un mélange d’infiltration et de shoot amalgamés autour du hack d’éléments interactifs. L’utilisation des caméras reste l’étape préliminaire à toute action. Ceci étant, de notables évolutions indiquent qu’Ubisoft a bien réfléchi à comment améliorer le gameplay sans foutre en l’air ce qui fonctionnait bien en 2014. Par exemple, passées les premières missions de mise en jambes, il n’est plus du tout possible de réaliser le moindre objectif uniquement en switchant d’une caméra à une autre, et il va falloir entrer dans la place pour atteindre certains points névralgiques. Pour les plus frileux, un petit buggy et un drone radiocommandés permettent de s’infiltrer par des chemins détournés et interagir avec différents éléments, mais là encore la plupart des missions principales nécessiteront une intervention manuelle, et donc une séquence d’infiltration et/ou de combat.
Sauf que contrairement à Aiden qui était un one man army se frayant sans problème un chemin à coup de M16 et encaissait plusieurs balles dans le buffet sans broncher, Marcus est un humain un peu plus normal qui supporte très mal la moindre fusillade et préfère mettre des chassés discrètement. La première arme de poing qu’on vous offre est d’ailleurs un taser qui endort temporairement les ennemis. Oui, enfin, le taser qui manquait cruellement à ceux qui jouaient l’infiltration dans Watch Dogs. C’est presque un symbole : outre la fragilité de Marcus, le level design pousse clairement les joueurs à rester discrets le plus longtemps possible. Le plus frappant reste la rapidité avec laquelle les gardes appellent du renfort : à la moindre alerte (alarme déclenchée, coup de feu tiré, Marcus repéré…) c’est tout une équipe d’intervention qui se pointe, voire même des voitures de police si vous avez tué quelqu’un. Et les ennemis en alerte sont vraiment agressifs. En clair, foncer dans le tas équivaut à se compliquer terriblement la tâche.
La très bonne surprise du jeu se situe ici : il pousse le joueur vers l’infiltration… et enrichit considérablement celle-ci. Outre le buggy, le drone et le taser évoqués plus haut, les possibilités de hack sont multipliées, à condition de développer son arbre de compétences. On va trouver toute une panoplie de détournements d’attention, allant de l’activation d’éléments basiques (portes, voitures, fenwick…) à la mise à prix de la tête du garde (déclenchant un combat entre gangs ou avec la police) en passant par les larsens, les faux appels… D’autres actions vont endormir temporairement les gardes comme le fait le taser. Enfin, certains éléments plus dévastateurs sont à utiliser avec discernement, puisqu’ils vont faire un gros « boum » et tuer des gens, ce qui va attirer des renforts. Bien sûr, il manque toujours des features indispensables à un jeu d’infiltration complet : pas moyen de déplacer les corps ou de les dissimuler, pas de cachettes à l’intérieur des niveaux, pas de costumes… Ceci étant, cela accélère considérablement le rythme de l’infiltration, créant une fuite en avant grisante. Une fois lancé dans le niveau, on est obligé d’avancer avant que les gardes endormis se réveillent ou soient découverts, il reste de la place pour l’improvisation et les réflexes, on peut jouer au chat et à la souris le temps que l’alerte passe…
Sauf que contrairement à Aiden qui était un one man army se frayant sans problème un chemin à coup de M16 et encaissait plusieurs balles dans le buffet sans broncher, Marcus est un humain un peu plus normal qui supporte très mal la moindre fusillade et préfère mettre des chassés discrètement. La première arme de poing qu’on vous offre est d’ailleurs un taser qui endort temporairement les ennemis. Oui, enfin, le taser qui manquait cruellement à ceux qui jouaient l’infiltration dans Watch Dogs. C’est presque un symbole : outre la fragilité de Marcus, le level design pousse clairement les joueurs à rester discrets le plus longtemps possible. Le plus frappant reste la rapidité avec laquelle les gardes appellent du renfort : à la moindre alerte (alarme déclenchée, coup de feu tiré, Marcus repéré…) c’est tout une équipe d’intervention qui se pointe, voire même des voitures de police si vous avez tué quelqu’un. Et les ennemis en alerte sont vraiment agressifs. En clair, foncer dans le tas équivaut à se compliquer terriblement la tâche.
La très bonne surprise du jeu se situe ici : il pousse le joueur vers l’infiltration… et enrichit considérablement celle-ci. Outre le buggy, le drone et le taser évoqués plus haut, les possibilités de hack sont multipliées, à condition de développer son arbre de compétences. On va trouver toute une panoplie de détournements d’attention, allant de l’activation d’éléments basiques (portes, voitures, fenwick…) à la mise à prix de la tête du garde (déclenchant un combat entre gangs ou avec la police) en passant par les larsens, les faux appels… D’autres actions vont endormir temporairement les gardes comme le fait le taser. Enfin, certains éléments plus dévastateurs sont à utiliser avec discernement, puisqu’ils vont faire un gros « boum » et tuer des gens, ce qui va attirer des renforts. Bien sûr, il manque toujours des features indispensables à un jeu d’infiltration complet : pas moyen de déplacer les corps ou de les dissimuler, pas de cachettes à l’intérieur des niveaux, pas de costumes… Ceci étant, cela accélère considérablement le rythme de l’infiltration, créant une fuite en avant grisante. Une fois lancé dans le niveau, on est obligé d’avancer avant que les gardes endormis se réveillent ou soient découverts, il reste de la place pour l’improvisation et les réflexes, on peut jouer au chat et à la souris le temps que l’alerte passe…
L’espion qui memait
De quoi être relativement enthousiaste au sujet du jeu, même si une certaine répétitivité des missions principales lassera les joueurs rushant le scénario. On conseillera de couper un peu avec des missions en coop ou du free roaming pour varier les plaisirs. Sauf qu’une fois établie la réussite du jeu sur le fond, reste la question épineuse de la forme. Pas tellement visuelle, puisqu’on a déjà souligné la sympathique retranscription de l’ambiance foutraque de San Francisco. Mais sur le traitement de son sujet, ses personnages et ses dialogues. Vous vous souvenez sûrement que le premier Watch Dogs, loin de s’atteler au passionnant sujet des dérives de la technologie, s’engluait dans un scénario cliché de blockbuster hollywoodien rempli de personnages foireux. Watch Dogs 2 tente de corriger cette erreur en se concentrant sur une histoire d’Internet des objets, de collecte de données personnelles et de machination politico-industrielle, en s’appuyant sur l’actualité et notamment les élections américaines. Sans trop en dévoiler sur l’histoire, on doit bien admettre que les créateurs du jeu ont compris les erreurs du premier jeu et donnent à sa suite de bien meilleures bases. Par exemple, le gain d’expérience est remplacé par des followers : l’objectif du jeu est de convaincre le public de télécharger l’application Dedsec, qui met la puissance de calcul des smartphones au service du groupe de hacker. Un louable effort pour justifier le fait que la progression des capacités in-game suive la progression de l’histoire. Mais outre le fait qu’on peut toujours voler, tuer et conduire comme un chauffard tout en se prétendant sauveur des libertés individuelles, deux problèmes majeurs subsistent.
Déjà, l’histoire se disperse en une multitude de sous-intrigues afin de couvrir un maximum de sujets liés aux NTIC. La scientologie, les objets connectés, Facebook, Google, les robots, l’armée, Trump, les machinations électorales, le piratage des machines à voter, la guerre des gangs, la guerre entre hackers… tout y passe, et on peine vraiment à faire le lien entre tout ça. Je dois avouer que je n’ai toujours pas compris comment étaient reliées certaines missions du début du jeu avec son dénouement final. Mais le jeu tente également de ratisser très large en ce qui concerne des problématiques plus générales, comme l’égalité homme-femme, le racisme, le sexisme, la transphobie, la gentrification, etc. A force de tirer de tous les côtés, le jeu tape parfois très juste, certains détails se révélant à la fois lourds de sens et assez subtils dans leur présentation. Tout le passage chez un simili-Google de la Silicon Valley parle très intelligemment du racisme, avec entre autres un garde de sécurité qui vous demandera plusieurs fois vos papiers parce que vous êtes l’un des seuls noirs à la ronde. On pensera également à Amanda, conseillère municipale ayant changé de sexe, un choix personnel sur lequel le jeu ne s’attarde absolument pas, préférant caractériser le personnage avec des éléments plus importants pour l’intrigue principale. Ceci étant, ces moments restent rare, et la plupart du temps Watch Dogs 2 s’éparpille au point de lasser le joueur.
Et surtout, quasiment tous les personnages et tous les dialogues sont à la limite du supportable. Comme s’il voulait rattraper le temps perdu avec Watch Dogs, le jeu passe son temps à faire référence à Internet, aux hackeurs, à la technologie et surtout à toute la pop culture qui l’entoure. Mais il le fait comme le feraient de jeunes ados : en s'attardant sur le paraître, sans s'interroger sur la pertinence de telle référence dans tel contexte. C'est un festival de punchlines de séries ou de films, références visuelles, expressions supposées geeks, et de memes. Plein de memes. Des memes partout, tout le temps, dans les écrans de chargement, dans les miniatures de missions, sur les murs des prisons, dans les cages d’ascenseur, dans les bruits de la ville, dans le froid des maisons… hum, désolé. Même les personnages sont construits autour d’archétypes mélangeant clichés hippies et geeks dans un déchaînement de puérilité gênante. Là encore, à force de ratisser large, certains sont un peu intéressants. Ou plutôt, permettent quelques scènes amusantes (j’avoue, la blague du hipsterpénis ou certains quiproquos avec Josh m’ont fait rire), mais c’est bien tout ce qu’on arrive à en tirer de positif. Le reste du temps, les joueurs de plus de 16 ans auront juste envie de frapper la totalité du casting jusqu’à que ce que mort s’en suive. Si on y ajoute des musiques de mission affreusement insupportables (sérieusement, le bruitage de moustique, c'est une idée de merde), le tableau est bien noirci. Dommage.
Déjà, l’histoire se disperse en une multitude de sous-intrigues afin de couvrir un maximum de sujets liés aux NTIC. La scientologie, les objets connectés, Facebook, Google, les robots, l’armée, Trump, les machinations électorales, le piratage des machines à voter, la guerre des gangs, la guerre entre hackers… tout y passe, et on peine vraiment à faire le lien entre tout ça. Je dois avouer que je n’ai toujours pas compris comment étaient reliées certaines missions du début du jeu avec son dénouement final. Mais le jeu tente également de ratisser très large en ce qui concerne des problématiques plus générales, comme l’égalité homme-femme, le racisme, le sexisme, la transphobie, la gentrification, etc. A force de tirer de tous les côtés, le jeu tape parfois très juste, certains détails se révélant à la fois lourds de sens et assez subtils dans leur présentation. Tout le passage chez un simili-Google de la Silicon Valley parle très intelligemment du racisme, avec entre autres un garde de sécurité qui vous demandera plusieurs fois vos papiers parce que vous êtes l’un des seuls noirs à la ronde. On pensera également à Amanda, conseillère municipale ayant changé de sexe, un choix personnel sur lequel le jeu ne s’attarde absolument pas, préférant caractériser le personnage avec des éléments plus importants pour l’intrigue principale. Ceci étant, ces moments restent rare, et la plupart du temps Watch Dogs 2 s’éparpille au point de lasser le joueur.
Et surtout, quasiment tous les personnages et tous les dialogues sont à la limite du supportable. Comme s’il voulait rattraper le temps perdu avec Watch Dogs, le jeu passe son temps à faire référence à Internet, aux hackeurs, à la technologie et surtout à toute la pop culture qui l’entoure. Mais il le fait comme le feraient de jeunes ados : en s'attardant sur le paraître, sans s'interroger sur la pertinence de telle référence dans tel contexte. C'est un festival de punchlines de séries ou de films, références visuelles, expressions supposées geeks, et de memes. Plein de memes. Des memes partout, tout le temps, dans les écrans de chargement, dans les miniatures de missions, sur les murs des prisons, dans les cages d’ascenseur, dans les bruits de la ville, dans le froid des maisons… hum, désolé. Même les personnages sont construits autour d’archétypes mélangeant clichés hippies et geeks dans un déchaînement de puérilité gênante. Là encore, à force de ratisser large, certains sont un peu intéressants. Ou plutôt, permettent quelques scènes amusantes (j’avoue, la blague du hipsterpénis ou certains quiproquos avec Josh m’ont fait rire), mais c’est bien tout ce qu’on arrive à en tirer de positif. Le reste du temps, les joueurs de plus de 16 ans auront juste envie de frapper la totalité du casting jusqu’à que ce que mort s’en suive. Si on y ajoute des musiques de mission affreusement insupportables (sérieusement, le bruitage de moustique, c'est une idée de merde), le tableau est bien noirci. Dommage.
Sur le fond, Watch Dogs 2 conserve et améliore les meilleurs éléments de son prédécesseur, ce qui en fait indéniablement un bon jeu. L’open world est consistant et cohérent et les joueurs sont poussés à jouer une infiltration dynamisée et enrichie. Sur la forme, il tente d’apprendre de ses erreurs de blockbuster premier degré, mais part dans l’excès inverse de la puérilité permanente, au point d’en devenir incroyablement irritant par moment.