TEST
Post Human W.A.R
Développeur / Editeur : Studio Chahut
Post Human W.A.R, ce nom ne vous dit rien? Il faut dire que le premier jeu du Studio Grenoblois Chahut Studio, s'est un peu perdu dans la masse des sorties de fin d'année. La seule fois où on avait mentionné le jeu dans nos pages, c'était à l'occasion de l'Indie Games Play 3... en 2014. Mais comme les comédies romantiques anglaises nous l'ont appris, il suffit parfois d'un simple hasard pour qu'il y ait rencontre. Voilà donc le test non attendu du jeu.
C'est plus notre guerre !
Post Human W.A.R est un jeu de stratégie au tour par tour qui voit s’affronter animaux parasités et robots dans les ruines de notre civilisation déchue. En effet, peu après que les humains aient fait place net, les robots ménagers, bien décidés à protéger les anciennes cités qu'ils continuent à entretenir, doivent prendre les armes. Pour cause, des animaux zadistes néo-ruraux des décharges veulent détruire les reliques humaines. Tandis qu'un groupe de singes parasités post-humanistes et technophiles voudraient quant à eux récupérer l'héritage des défunts défaits. Bref, toute une histoire qu'on ne dévoile en partie ici que pour souligner le délire créatif qui a donné naissance aux aspirateurs snipers, singes-samouraïs, tatous-guerriers et frigos volants que vous dirigez dans le jeu.
De façon plus pragmatique, le jeu fonctionne sur un système de deck et de valeur d’armée. Autrement dit, vous choisissez vos unités, et une fois sur le terrain il est impossible d’en produire plus ni de construire des infrastructures. Il n’y a pas non plus de gestion de ressource, d'xp ou d’armée en dehors des combats. Le jeu se concentre donc sur de courts affrontements autonomes allant de quelques à une quinzaine d’unités pour chaque camp. Ils peuvent se terminer de manière classique (l’extermination totale de l’autre, comme disait le poète), mais il est aussi possible de la jouer plus fine en allant détruire le totem adverse pour l’affaiblir considérablement à chaque tour, ou en tuant le Champion ennemi, ce qui conduit à une victoire immédiate (encore faut-il deviner quelle unité adverse a été choisie pour ce rôle).
Durant les combats eux-mêmes, Post Human W.A.R s’approche fortement d’une logique de jeu de plateau. Contrairement à de nombreux jeux du genre, il n’y a ici ni brouillard de guerre, ni RNG. N’espérez donc pas tendre une embuscade à votre adversaire ou gagner sur un coup de dé. L’information est totale et, comme aux échecs, c’est votre capacité à anticiper les mouvements de l’adversaire et à « occuper » le terrain qui vous fera gagner. Les cartes, découpées en hexagones, sont généralement assez grandes et sont structurées autour de plusieurs éléments : décors infranchissables qui peuvent créer des goulots d’étranglement, couvertures destructibles derrière lesquelles placer vos tireurs, mais aussi des zones qui peuvent ralentir, soigner, ou blesser vos unités. Vos troupes les plus imposantes peuvent occuper jusqu'à sept cases, tandis que vos unités volantes font fi des obstacles. Vous pouvez donc absolument tirer parti du terrain pour piéger votre adversaire, ou vous embouteiller vous-même.
Le choix : des armes
Si le gameplay de base est assez classique, le jeu peut compter sur quelques atouts pour créer de la diversité. Post Human W.A.R aligne en effet un nombre et une variété d’unités conséquents. Les trois factions incarnent une tendance tactique spécifique, et chacune d’elle dispose de 12 unités différentes. Si on retrouve des archétypes classiques aux seins des trois armées (tanks, glass-cannon, etc…), on est loin d’un simple reskin paresseux d’unités identiques. Par exemple les classes de support, et donc les mécanismes de soin/protection sont totalement différents selon la faction. Vous disposez donc largement de quoi expérimenter, découvrir des synergies, et affiner vos compositions en fonction de la valeur d’armée de la partie ou de votre style de jeu.
Reste que la dynamique globale du jeu repose principalement, mais pas exclusivement, sur un système de contres : les unités volantes sont immunisées au corps à corps mais ne peuvent pas se couvrir des tirs à distance, les unités à distance sont peu résistantes, etc… Les compétences particulières des différentes unités permettent heureusement de mitiger et de complexifier ce système, qui sans ça serait vite limité. Mais sans possibilité de produire des unités durant les combats, il est important de bien composer son deck et de savoir quels ennemis éliminer en priorité sous peine de se retrouver dans une impasse.
Enfin, pour apporter un grain de folie aux affrontements, il existe une ressource pour booster une de vos unités pendant un tour. Vitesse, puissance d’attaque, soin ou un peu des trois, c’est votre choix. Vous pouvez aussi fabriquer une couverture de fortune. Cette ressource s’obtient en alignant un deck moins couteux, en recyclant des unités inutiles, ou en récupérant des caisses sur la carte. Autant vous prévenir, mieux vaut ne pas laisser l’adversaire les ramasser. Ce mécanisme, malgré son efficacité réelle, peut aussi parfois s’avérer frustrant, surtout au début. Il est en effet assez délicat à anticiper et peut rapidement faire tourner une bataille en votre faveur ou défaveur. Sur les escarmouches de moindre importance, la gestion de cette ressources est même souvent ce qui décide de l'issue de la bataille, ce qui est un peu dommage puisque ça court-circuite en partie les autres mécanismes de jeu.
Parasités sociaux
Côté contenu, Post Human W.A.R propose une courte campagne solo pour chacune des trois factions jouables, ce qui permet de découvrir les enjeux tactiques et les différentes unités du jeu. C’est aussi l’occasion de profiter de quelques courtes cut-scenes artisanales très sympas qui permettent à chaque camp de raconter son petit morceau d’histoire dans un style différent. La campagne est d’une difficulté honorable, et l’IA fait plutôt bien son job. Un mode expert permet aux plus fins tacticiens d’y revenir pour un vrai challenge et il est aussi possible d’escarmoucher à volonté et de jouer en 1v1 en local.
Si ce solo constitue déjà un beau morceau, Post Human W.A.R a surtout vocation à être joué en multi compétitif. On ne peut que saluer le système proposé ici, puisque vous pouvez continuer à jouer en solo lors d’une recherche de partie, et recevez des notifications de recherche lorsque vous jouez en solitaire. D’un même clic, votre partie est sauvegardée et vous rejoignez votre partie multi. Malin. Par contre, le matchmaking n’existe pas, attendez-vous à des roustes. En ce qui concerne la communauté, il est possible de trouver des matchs rapidement, mais il faudra parfois être persévérant ou se constituer un réseau d’amis. A noter au passage que les matchs ne sont pas excessivement longs, il est possible de boucler une partie sur une petite carte en 5 minutes, ce qui est très agréable.
Enfin, et c’est assez rare pour être souligné, la qualité de finition du jeu est tout bonnement excellente, aussi bien dans les petits à-côtés (l’histoire, la qualité des animations, le codex, les nombreuses répliques des unités quand on les sélectionne et les petits détails dissimulés un peu partout) que dans le jeu lui-même. L’interface est claire et efficace et la prise en main est immédiate et toutes les informations importantes sont à portée de main. Le jeu est bourré de clins d'yeux et d'humour sans jamais se montrer trop ostentatoire ou envahissant. Bref, les six ans de développement ont porté leurs fruits.
TL;DR
Post human W.A.R est un jeu de stratégie très solide. On sent que le développeur avait une vision claire du type de jeu qu’il voulait faire et que rien n’est laissé au hasard. Pour le coup, il a donc principalement les « défauts » de ses qualités. Mettant la réflexion au cœur de sa conception de la stratégie, il y a peu de place pour le bluff, le hasard, les techniques de dissimulation ou l’improvisation. Chacun des joueurs ayant toute les cartes en mains pour prendre ses décisions, il s’agit plus de résoudre une situation que de s’y adapter.
En l’absence d’éléments classiques comme le brouillard de guerre, on aurait bien apprécié plus de possibilités tactiques, comme la possibilité de prendre les unités à revers, ou des compétences à activer sur certaines unités. Mais dans l’ensemble, le jeu compense amplement par sa générosité et un souci du détail à tous les niveaux. Post Human W.A.R a donc de quoi séduire les amateurs de stratégie, qui se tourneront vite vers le multi, mais aussi les curieux du genre, qui souhaitent un jeu exigeant mais simple à comprendre et à prendre en main, pas excessivement long, et doté d’une atmosphère sympa sans être envahissante.
Pour un jeu qu’on n’attendait pas, Post Human W.A.R est une très bonne surprise. On vous invite à y jeter un oeil. On a également réalisé une interview de Gabriel WINK, créateur du jeu, que vous pouvez retrouver en cliquant ici.