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Oxenfree : L'ado crise, début de la saison des frayeurs
Certains projets ont le chic pour susciter la curiosité. Par exemple, difficile de réprimer un haussement de sourcil en découvrant que des anciens de chez Disney et de chez Telltale se sont retrouvés pour créer un nouveau studio. Un étonnement qui laisse place à un sérieux intérêt quand on apprend que le premier bébé de Night School Studio, le nom de cette fameuse structure, se présente comme un hommage aux teenage movies et plus particulièrement au cinéma d'horreur. Cette curiosité ne s'est pas essoufflée au fil des mois et il suffisait d'une bonne occasion, une ristourne Steam par exemple, pour qu'elle fasse de nouveau parler d'elle.
Promenades et bavardages
Autant prévenir le badaud d'entrée de jeu, Oxenfree porte en son sein l'héritage de Telltale. Comprenez par là qu'il s'agit de l'un de ces titres que certains qualifient de narratifs (comme si les autres ne proposaient pas de narration...) et qui sont globalement davantage portés sur les bavardages que sur la castagne. En l'occurrence, Night School Studio va même plus loin que son grand frère Telltale en se débarrassant totalement des QTE et des effets de mise en scène issus des jeux d'action.Dans Oxenfree on dirige Alex, une jeune fille dont le seul objectif immédiat est de passer une soirée plutôt sympa. Pour ce faire, elle est allée retrouver d'autres ados sur une île inhabitée et tout ce beau monde compte bien profiter de l'occasion pour apprendre à se connaître tout en jouant à se faire peur. Les interactions avec l'environnement sont très limitées et le seul objet qu'on va réellement tripoter tout au long de l'aventure est une vieille radio.
Mais alors concrètement qu'est ce qu'on fait dans Oxenfree ? Principalement on se balade dans de très jolis décors en 2D et on papote. Ce sont en grande partie ces discussions qui vont déterminer le cours du scénario. Le jeu propose constamment des dialogues à choix multiples et en temps limité, un bavardage incessant qui imprime son rythme à l'aventure. Notez au passage que l'ensemble n'est pas encore traduit et qu'il faut donc une certaine maîtrise de la langue de Wes Craven pour ne pas être largué en route.
L’adolescence ou l'horreur du quotidien
Privilégier à ce point les conversations sur l'action n'est pas anodin, c'est un choix qui renvoie le joueur à une forme d'impuissance, le forçant à subir un peu malgré lui une plongée progressive dans l'horreur. En effet, si la nuit débute par une banale soirée sur la plage, les choses dérapent très vite lorsque vous entrez en communication avec de mystérieuses entités par le biais de votre radio. Oxenfree joue alors avec les codes du genre horrifique en se faisant un plaisir de disperser les ados aux quatre coins de l'île et en multipliant les situations de plus en plus creepy.N'allez pas imaginer que le but du titre est réellement de vous donner la chair de poule. Ici pas de jump scare ni de scènes dégoûtantes, l'objectif est plutôt d'installer une ambiance pesante, assez malsaine, dans laquelle les protagonistes vont patauger. On comprend assez vite que le véritable sujet d'Oxenfree tourne moins autour du paranormal que de préoccupations tout ce qu'il y a de plus terre à terre. Comment Alex va-t-elle gérer l'arrivée de son nouveau beau frère dans le foyer familial ? Va-t-elle rester liée à son meilleur ami même si elle part continuer ses études au loin ?...
L'apparente légèreté des conversations cache en réalité des préoccupations bien plus profondes. Avec ses airs de ne pas y toucher, Oxenfree brasse des thématiques assez fondamentales telles que la gestion du deuil ou l'entrée dans le monde adulte. On pourrait schématiser en considérant que c'est finalement les tournants de la vie qui sont à l'honneur à travers l'ensemble du jeu. Ça paraît pompeux, mais c'est abordé de façon assez fluide et avec assez d'humour pour ne pas plomber l'expérience. S'il fallait résumer, on retiendrait que l'on ressort de cet Oxenfree avec l'impression d'avoir revécu une tranche d’adolescence, les problèmes d'acné en moins.
Oxenfree mérite réellement la curiosité qu'il avait suscité au moment de sa sortie, pas parce qu'il s'agit d'un grand jeu ni d'une aventure trépidante, mais plutôt parce qu'il s'apparente à une véritable bouffée d’adolescence. S'y plonger revient peu ou prou à ouvrir une capsule temporelle ou à réécouter la vieille compilation cassette que vous aviez minutieusement enregistrée pendant vos années collège. Découvrir une cure de jouvence de cet acabit, ça n'a pas de prix.