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Un Rédacteur Factornews vous demande :

TEST

Bioshock

CBL par CBL,  email  @CBL_Factor
Oublions temporairement les problèmes du lancement. Un jeu pareil ne mérite pas qu’on s’arrête sur des éléments bassement matériels. En appelant le site du jeu « The Cult Of Rapture », 2K n’imaginait pas qu’ils allaient frapper aussi juste. Bioshock fait parti de ces très rares titres qui sont cultes dès leur sortie. PC ou 360, même combat : vous devez y jouer !

En 1960, le héros du jeu prend l’avion pour aller voir sa famille. Pas de chance, son avion se crashe en plein océan Atlantique et c’est le seul survivant. C’est à ce moment qu’on prend les commandes. On entre dans un phare mystérieux puis dans un bathyscaphe qui nous emmène dans une cité construite au fond de la mer : Rapture. Un certain Andrew Ryan, le concepteur et le chef de la cité, nous expose brièvement sa vision du monde. Puis un certain Atlas nous guide par l’intermédiaire d’une radio. Vu l’état des installations, il semble qu’on arrive après une bataille et qu’on soit arrivé en enfer, un enfer bleu où règnent les luttes de pouvoir, les petites filles démoniaques et les modifications génétiques. L’idée de ce test n’est surtout pas dévoiler le scénario mais sachez que tous vos "pourquoi" auront une réponse sensée.

Le schéma narratif de Bioshock est le même que celui d’Half-Life, c'est-à-dire une sorte d’anti-Metal Gear Solid 2. On débarque dans Rapture après un voyage contemplatif sublime et on plonge rapidement dans le bain sans trop d’explications avec pour seule arme un outil. Mis à part au début, le héros est muet et on ne se voit jamais. Il y a très peu de cinématiques et elles conservent la vue à la première personne. Tout cela permet au héros de s’effacer devant le joueur et de le rendre responsable de ses actes, surtout quand ces derniers sont peu recommandables (voir plus bas). Bioshock joue beaucoup sur les non-dits et les allusions, ce qui ne gêne en rien la compréhension, pour peu qu’on se creuse un peu les méninges. Tout au plus le jeu s’accorde quelques légers flashbacks. On découvre l’essentiel de l’histoire en écoutant les différents magnétophones-journaux et en lisant les inscriptions sur les murs. On comprend progressivement ce qui a mal tourné : la folie déclenchée par l'Adam (des cellules souches sécrétées par des larves), la révolution qu'a provoquée la dictature de Ryan, les expériences qu'ont menées des scientifiques « décomplexés » comme dans les camps de concentration… Le jeu aborde plus ou moins directement des thèmes sensibles à la manière des grands auteurs de SF : religion, science, génétique, utopies, capitalisme…


Une ville qui a fière Rapture


Rapture est une sorte de ville fantôme qu'on visite juste après la fin de son âge d'or. L'ensemble fait penser à une fabuleuse machine dont le mécanisme a fini par rouiller. En parcourant ce monde, on découvre la machinerie complexe (et souvent cassée) qui fait fonctionner la ville avec des rouages, des pistons, des cordes et des tonnes de tuyaux qui fuient. Partout, on trouve des affiches qui vantent les vertus des plasmids ou du monde créé par Ryan tandis que des haut-parleurs crachent des publicités surréalistes. Grâce à son isolement et à la liberté dont jouissent les créatifs et les scientifiques, Rapture est technologiquement bien plus avancée que ne l’est le reste du monde. C’est un moyen scénaristique pratique pour mettre des robots volants mitrailleurs à la fin des années 50 mais pour les décors, le jeu conserve le style de cette époque à base de boiseries et de néons. Le mélange des deux fait de Bioshock le digne représentant du rétro-futurisme dans les jeux vidéo. La ville est découpée en différentes zones ayant chacune un thème : le pavillon médical, les pêcheries, les splendides jardins, les appartements de luxe... L'ensemble fourmille de détails et on passe un temps fou à observer ce petit monde englouti en se rendant compte du boulot énorme effectué par les développeurs. On a l’impression d’admirer un univers sorti de l’imagination de Jules Vernes croisée avec celle de Phillip K. Dick.

Les développeurs se sont amusés à monter des petites saynètes un peu partout où l’horreur est de rigueur. On croise des potences bien fournies, un couple qui danse et qu’il ne vaut mieux pas déranger, un cadavre dans une baignoire avec une serviette sur la tête, une famille dont tous les membres sont assis sur leurs canapés, un musée de chrosomes congelés… Le jeu n’est pas spécialement effrayant mis à part quelques jeux de lumière sympathiques mais il règne sur l’ensemble une atmosphère particulièrement malsaine vraiment très bien rendue. Une chose est sûre : on n’a pas envie de rester à Rapture. Surtout quand on rencontre ses occupants. En effet, la ville est loin d'être complètement vide. Les survivants des différents évènements se sont créé leur petit univers au sein même de Rapture et agissent pour leur compte ou pour celui de leur chef. Obsédés par la beauté, ils ont presque tous le visage défiguré par la chirurgie esthétique et portent des masques.


Les frères qui Rapture


L'Adam leur est monté à la tête et ils sont complètement cinglés, une folie qu'on trouve dans leurs expressions faciales, leur regard et leur voix. On croise une femme qui pleure au dessus de son berceau qui contient un flingue, des psychopathes qui attaquent tout ce qui bouge à la clé à molette, des infirmiers qui cherchent à opérer à la grenade… Quand ils ne nous attaquent pas, tout ce petit monde discute ou plutôt soliloque. Ils ressassent leurs vieux souvenirs ou leurs envies du moment. En combat, ils sont très vindicatifs mais ils ne sont pas très intelligents. Leurs réactions sont parfois étranges : j'en ai vu fuir après m'avoir quasiment achevé. Les ennemis respawnent régulièrement et de façon aléatoire dans les différentes zones du jeu ce qui fait qu'on est constamment sur ses gardes et qu'il y a rarement des temps morts. Si on va d’une zone à l’autre pour suivre l’histoire de manière quasi linéaire, il n’est pas interdit de revenir dans les zones précédentes, bien au contraire. De même, chaque zone est très vaste et contient de nombreux lieux « inutiles » qu’on visite juste pour le plaisir ou pour y trouver des munitions et des trousses de soin.

Le gameplay s’enrichit progressivement au cours du jeu. A la manière de son illustre père System Shock 2, Bioshock part sur la base d’un FPS solide à laquelle on aurait greffé des éléments de jeu de rôle. Cela commence avec des modifications génétiques permettant de faire des choses surhumaines. Elles sont de 2 types : les plasmids se lancent comme des sorts tandis que les fortifiants sont activés en permanence. On ne peut utiliser qu’un nombre limité de modifications en même temps. Pour en avoir plus, il faut acheter des nouveaux emplacements. Les modifications surnuméraires ne sont pas perdues mais stockées dans la génothèque et des bornes permettent d’échanger les modifs. Du coup, on jongle souvent entre plusieurs jeux de modifications selon le niveau et le contexe. Grâce à ces modifications, on pirate plus vite les systèmes, on fait de la télékinésie pour envoyer balader les objets et les cadavres (comme avec le gravity gun d’Half-Life 2), on envoie des éclairs quand on se fait frapper, on regagne de l’Eve en buvant de l’alcool…


Adam & Eve


L’Eve est la substance qui est consommée quand on utilise un plasmid. L’Adam permet d’acheter dans les Jardins des Glaneuses des emplacements et des modifications, même si on peut trouver ces dernières en fouillant bien chaque zone. Pour récupérer de l’Adam, il faudra faire connaissance avec les Petites Sœurs qui récoltent cette substance sur les morts. Le seul problème est qu’elles ont des gardes du corps très spéciaux qu’il faudra tuer. Baptisés Big Daddy en anglais, ce sont d’immenses scaphandriers lourdement armés qui ne savent faire que trois choses : suivre une petite sœur, attaquer quiconque tape une petite sœur ou quiconque lui fait du mal. Equipés d’une perceuse ou d’un lance-grenade, ils sont rapides, pas très malins et particulièrement puissants. Entendre leur pas lourd et leur grognement presque animal au loin produit toujours son petit effet, surtout après qu'on en a affronté un ou deux. On comprend rapidement quelles sont les techniques efficaces pour les liquider mais ce n’est pas pour autant qu’on les attaque à l’improviste. Sans l’armement approprié, le combat est ardu. Et même avec, la moindre erreur est souvent fatale.

Heureusement, mourir n’est pas très contraignant. On réapparait directement dans une des vita-chambers du niveau. Il arrive qu’entre temps, le Big Daddy soit parti et se soit régénéré. Il faut donc avoir toujours un bon paquet de trousses de soin histoire de ne pas passer son temps à faire des allers-retours vers le poste de soin ou la vita-chamber la plus proche. J’ai parlé d’un armement approprié car qui dit FPS dit armes. Il y a 6 armes en tout : clé à molette, pistolet, thompson, shotgun, lance-grenades, lance-liquide et arbalète. Mis à part la clé à molette, chacune possède trois types de munitions. Ainsi le lance-liquide peut balancer du napalm pour brûler, de l’azote liquide pour geler ou du liquide ionique pour électrifier. Les armes sont superbement modélisées et la sensation de puissance est au rendez-vous. Mais ce n’est pas tout : Rapture étant un monde dangereux, il y a des tourelles de tir automatique un peu partout et des caméras. Si les caméras vous repèrent, une alarme de sécurité se déclenche et des robots de combat volants vous traquent. Soit il faut payer pour arrêter l’alarme soit attendre qu’elle se finisse. On peut pirater ces tourelles et ces robots. Une fois ceci fait, les tourelles tirent sur vos ennemis et les robots vous protègent. Plus tard, on chope même un plasmid qui permet de faire croire à un Big Daddy qu’on est une petite fille et qui en fait notre protecteur.


Rapture de stock


En combinant le décor, la sécurité, les plasmids et les armes, cela donne une variété de combat rarement vue dans un FPS, un mélange de Dark Messiah of Might & Magic, Half-Life 2, Deus Ex et Jedi Knight. Allez-vous envoyer un bidon explosif sur le groupe d’ennemis qui arrive ? Allez-vous attendre qu’ils soient dans l’eau pour les électrocuter en groupe ? Allez-vous les congeler juste devant une tourelle ? Allez-vous renvoyer les grenades qu’ils vous balancent ? Allez-vous poser des pièges et achever les survivants au pistolet ? Comme les munitions partent très vite et qu’elles valent cher, il faut varier les styles de combat et utiliser au mieux l’environnement. En plus, c’est bien plus rigolo de cette manière. Les combats sont d’une rare violence et les headshots sont légion. Les ennemis sont assez bien armés et n’hésitent pas à foncer vers la borne de soin la plus proche pour se refaire une santé. Les giclées de sang sont vraiment très réussies et l’ensemble du jeu est assez gore. A un moment, on trouve un appareil photo. A la manière d’un Pokemon Snap ou d’un Beyond Good and Evil, on peut prendre des photos des ennemis et elles sont notées. Plus la note est élevée et plus la barre de recherche associée à l’ennemi monte. Quand la barre est complète, on gagne des tips pour mieux tuer cet ennemi, des bonus aux dommages voir des modifications génétiques.

Sur les nombreux cadavres, on trouve souvent un bon paquet de dollars. Cet argent sert à acheter des munitions, de la vie, des seringues d’Eve… dans les différents distributeurs automatiques mais aussi à racheter les tourelles et les robots pour ne pas avoir à les pirater. Ce serait bien dommage car cette phase de piratage est très sympa : sous forme d’un mini-jeu qui rappelle Pipe Dream, il faut amener un flux d’un point d’entrée à un point de sortie en déplaçant les différents tuyaux et en évitant les alarmes et les surcharges. Des fortifiants permettent de ralentir le flux ou d’enlever des plaques d’alarmes et de surcharges. Il est même possible de pirater les distributeurs pour faire baisser les prix. On trouve aussi des éléments (tuyaux, vis, essence…) qui permettent de fabriquer des objets (généralement des munitions) dans un autre type de distributeur, lui aussi piratable. On regrettera l’absence d’inventaire pour voir tout ce qu’on stocke et surtout pour ne pas pouvoir conserver la quantité phénoménale d’alcool présente à Rapture à base de Merlot, de Vodka, de Whisky et d’Absinthe. Cet alcool fait gagner de la santé mais on voit trouble au bout de quelques bouteilles. On peut aussi fumer des clopes et manger un paquet de cochonneries du genre chips ou barres céréalières.


Alcool, cigarettes et petites pépées. Ca te rendra maso, ça te rendra cinglé


Plus haut, j’ai parlé des combats contre les Big Daddy mais j’ai omis de préciser comment on récupère l’Adam. Une fois le Big Daddy tué, la petite soeur qui l’accompagne est prostrée à côté de son cadavre et elle est terrifiée. Deux choix s’offrent à vous : soit vous la tuez, soit vous la sauvez. La tuer permet de gagner deux fois plus d’Adam. Pourtant elles n’ont rien d’humaines avec leurs grands yeux immondes et leur seringue géante qu’elles plantent dans les cadavres. J’en ai fait des trucs atroces dans les jeux : utiliser un chat comme silencieux, tester ma gatling en plein centre ville de Los Santos, jouer au foot avec la tête d’un ennemi abattu, électrocuter au tazer un ennemi jusqu’à ce qu’il flambe (petit jeu ami lecteur : dans quels titres peut-on faire ces choses ?) mais dans le cas présent, je n’ai pas pu en tuer une seule. La première fois est la pire car on n’a aucune idée des conséquences.

Techniquement, le jeu est aussi une énorme claque. La modélisation des personnages et les textures sont magnifiques, les effets de lumière et de particules sont splendides et faits avec goût, sans excès. Par contre c'est au prix de temps de chargement vraiment très longs. L’interface se fait discrète et est bien pensée. Par exemple, quand on choisit un plasmid, la main du héros change physiquement d’apparence ce qui permet de reconnaitre quel plasmid on a sans avoir besoin d’une icône ou d’un texte pour l’indiquer. Le sound design est fantastique et mérite que vous fassiez tout le jeu au casque avec une bonne carte son qui supporte l’EAX. Si l’anglais n’est pas un problème, jouez au jeu en VO. Les textes comme les voix sont bien plus réussies. Mais la VF reste très sympathique. Les acteurs ont mis du cœur à l’ouvrage notamment pour les communications radio et les magnétophones. Au niveau durée de vie, cela ne dépend que de vous. On peut rusher comme un porc et le jeu se boucle en une dizaine d’heure mais ce serait du gâchis. Quand on prend le temps de bien tout explorer, ça tape plutôt dans les 25 heures en mode moyen de difficulté. Vu la qualité du titre, l’ouverture du gameplay et les trois fins possibles, c’est avec plaisir qu’on relancera ce titre à l’avenir.

Configuration de test : Core 2 Duo T7400, Geforce Go 7950 GTX avec 512 Mo de ram vidéo, 2 Go de Ram, XP.

Le monde des jeux vidéo est rempli de suites faciles, de jeux sans âme exploitant toujours les mêmes univers aux couleurs marrons-gris et utilisant les mêmes mécanismes de gameplay. Quand Bioshock sort, on ne peut qu’applaudir. Irrational Games a développé un jeu bourré de bonnes idées, dans un monde fascinant, original et malsain, avec un bon scénario et une narration intelligente, un gameplay très riche et des graphismes somptueux. La perfection n’est pas de ce monde mais avec Bioshock on s’en approche beaucoup. Alors il faut saluer l’effort car un titre de cette trempe, on n’en reverra pas avant un bon bout de temps. C’est une expérience unique et émotionnellement très forte.

SCREENSHOTS

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