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Interview : Augmented Magic
par Fougère,
email @JeSuisUneFouger
Sur Factor, on aime bien parler de jeux vidéo. Puis des fois, on parle de jeux tout court (attendez de voir ce légendaire test du Scrabble que vous prépare Nicaulas) ou de vidéos tout court, comme les Popcorn de CBL qui voit tous les films cool avant nous. Et bien cette fois, on ne va parler de rien de tout ça, on va parler de spectacle de magie, de technologies de pointe et du hasard qui fait bien les choses.
Augmented Magic, c’est 3 personnes qui ont décidé que la magie c’était cool, mais avec de la réalité augmentée, c’est quand même vachement mieux. Après avoir traversé le monde en long, en large et en travers, ils se sont posés dans la banlieue parisienne pour travailler sur leur premier vrai spectacle. Nous sommes allés les rencontrer dans leurs workshop, une version geek de la caverne d’Alibaba.
Fougère : Et bien bonjour à tous les trois. On pourrait commencer par un petit tour de présentation, qu’est-ce que vous en dites ?Augmented Magic, c’est 3 personnes qui ont décidé que la magie c’était cool, mais avec de la réalité augmentée, c’est quand même vachement mieux. Après avoir traversé le monde en long, en large et en travers, ils se sont posés dans la banlieue parisienne pour travailler sur leur premier vrai spectacle. Nous sommes allés les rencontrer dans leurs workshop, une version geek de la caverne d’Alibaba.
Moulla : CACACACACA ! C’est pour voir si tu recopies tout. Ça me fait penser à une interview où j’avais passé mon temps à dire des conneries. On avait beaucoup rigolé, jusqu’au moment où je me suis rendu compte que la nana avait tout recopié et que je passais pour un con dans un journal.
Sinon, moi je suis Moulla et je suis magicien / ingénieur. J’ai commencé la magie très tôt, vers 10 ans, quand j’ai compris que ce n’était pas vrai, que c’était des techniques pour faire croire que.
Fougère : Attends, entre 9 et 10 ans t’as compris que la magie c’était du chiqué ?
Gamgie : Ouais, avant il était attardé.
Moulla : Quand tu sais que j’ai sauté dans l’escalier pour essayer de m’envoler, on peut se poser la question. Bref, j’ai commencé par des tours de cartes et du close-up, de la magie qui est proche des gens. J’ai enchainé avec du théâtre, des spectacles sur scène, mais j’étais frustré parce que je ne pouvais pas allez aussi loin que je voulais. Du coup, je suis tombé sur une école d’ingénieur, l’ESIEA, avec une spécialité Réalité Virtuelle, qui était ce qui se rapproche le plus de ce que je voulais faire, surtout au niveau de l’illusion. Pendant tout mon cursus, j’ai détourné tous les projets que j’avais pour mélanger magie et techno, ce qui m’a permis d’aller faire un stage à Dassault System, où j’ai été payé pour pouvoir continuer ma recherche entre magie et technologie. C’est suite à ça que j’ai fait mes premières vidéos Youtube, puis que j’ai eu mes premières demandes de spectacle. Le problème, c’est que ça marchait en vidéo sur Youtube, mais pas en vrai. Et c’est là que j’ai rencontré Gamgie ! On s’est rencontré dans les opens spaces, tard la nuit, je ne savais pas trop ce qu’il faisait.
Gamgie : Je faisais des photos tout nu.
Fougère : Sympa ! C’est pas du tout l’ambiance que j’imaginais Dassault System en fait.
Gamgie : Ça allait, j’avais juste un peu peur que la femme de ménage arrive à n’importe quel moment.
Moulla : Je lui ai présenté mon projet, qui était pour dans 3 jours et qui ne marchait pas du tout, et il s’est rendu compte que je codais comme une merde. Il a gentiment proposé de s’en occuper, il l’a fait, et ça a super bien marché. On a commencé les premiers spectacles comme ça, j’étais stagiaire et lui venait tout juste d’être embauché. Suite à ça, il a quitté son taff, j’ai refusé le job qu’on me proposait et on a créé la structure Augmented Magic et les premiers spectacles.
Fougère : Ok, du coup on va enchainer sur Gamgie ?
Gamgie : Bah moi, j’ai fait Polytech Grenoble, pour la même raison que tous les informaticiens : Je n’en sais rien, ça avait l’air cool. Pendant mon cursus, j’ai fait beaucoup d’associatif, je me suis investi dans le secteur culturel grenoblois en organisant des concerts, des festivals, etc. Une fois le diplôme en poche, j’ai été pris à Dassault System, et j’ai rencontré Moulla. Son idée de mélanger de l’informatique et du spectacle m’a beaucoup plu, surtout que ça n’existait pas à l’époque ce genre de chose. Il y avait aussi un lien avec les jeux vidéo qui m’intéressait, notamment avec la question de l’interactivité entre le public et le mec sur scène, comment gérer l’imprévu et l’aléatoire pour que le spectacle ne soit jamais pareil. On s’est lancé comme ça, j’ai pris en main toute la partie dev avec un peu de graphismes, de modélisation, et ainsi de suite. Maintenant qu’on fonctionne plutôt bien, on se retrouve avec un gros volume de spectacles à gérer, notamment au niveau de la mise en scène et de la mise en place technique, et ça faisait beaucoup pour un seul homme. C’est comme ça qu’on a rencontré Winston et qu’on a décidé de l’intégrer à l’équipe.
Fougère : Winston donc ! *se tourne vers Winston*
Winston : … *Winston regarde son téléphone en écoutant d’une oreille*
Fougère : WINSTON DONC !
Winston : Ha ! Pardon.
Moulla : Arrête de jouer à Pokemon pendant l’interview !
Winston : Bon. Moi j’ai fait l’ENSIIE, à la base pour faire la robotique.
Fougère : Warf. Désolé de te dire ça, mais la tu t’es bien foiré quand même.
Winston : Bah en fait, l’option robotique était couplée avec l’option Réalité Virtuelle. Du coup, je n’ai rien foutu à l’école jusqu’à ce que je découvre l’option Réalité Virtuelle, et j’ai fait que ça. J’ai fini par chopper un stage pour faire de la RV chez Dassault System.
Fougère : Du coup t’es passé au même endroit qu’eux, mais pas au même moment.
Winston : Si ! Ça s’est chevauché pendant 3 jours. Je suis arrivé et ils sont partis. Le hasard de la vie. Le hasard de ton placement de bureau aussi.
Moulla : Il aurait pu croiser Gamgie qui restait jusqu’à 23h pour prendre des photos de lui tout nu sur les PC de Dassault System.
Gamgie : Il me fallait un espace où exprimer ma sensibilité artistique.
Fougère : Je ne suis pas sûr que la femme de ménage soit d’accord avec toi, mais bon.
Winston : Reprenons. Après Dassault System, je suis parti à Singapour pour faire le technico-commercial : faire de la vente, gérer des projets, assurer un premier niveau de support, etc. J’ai fait pas mal de trucs, entre démos techniques ou suivi de projet, mais ça ne me plaisait pas du tout. Je suis rentré en France, et j’ai cherché autre chose. Je m’étais formé sur Unity quand j’ai vu une offre d’emploi pour Augmented Magic poper sur Facebook. J’ai tenté ma chance et PAF ! me voilà. Je trouvais tout ce qu’ils faisaient très cool, ça mixait du dev, du dessin, de la magie, ect, donc je suis très content de bosser pour eux.
Fougère : Très bien. Ça fait combien de temps que la structure Augmented Magic existe ?
Gamgie : Depuis Juin 2012. Avant c’était l’apocalypse total, on n’avait pas de cadre, pas de PC, rien. Les premiers spectacles étaient vraiment scandaleux, on n’avait pas de matos, aucune idée de comment jouer un spectacle, et on se faisait déjà booker pour aller faire un show à Orlando.
Fougère : C’est spécial comme façon de faire. Vous avez combien de « show » à votre actif du coup ?
Moulla : C’est un peu compliqué de répondre, parce que le « spectacle » change souvent. Pour une télé, on va faire quelque chose de très court, 2-3 min, hyper efficace et hyper visuel. Si on va dans une entreprise, on va plus mettre une techno en avant, un téléphone Microsoft si on va chez Microsoft par exemple. Notre spectacle à nous (celui sur lequel on bosse en ce moment), on va partir sur quelque chose de plus théâtral, où on va essayer de masquer la technologie et se concentrer sur l’émotion qu’on veut faire ressentir.
Fougère : Ok, vous adaptez complètement le contenu en fonction du contexte en fait.
Gamgie : C’est ça. Mais si tu prends la globalité des « shows » qu’on a fait, on doit être à 200 ou 300 dates. Y’a des petits et des gros trucs, mais on tourne surtout avec des clients en fait. Intel, par exemple, on a un partenariat avec eux. Ils vont nous présenter des technos avant de les mettre sur le marché et ils nous demandent ce qu’on pourrait faire avec.
Fougère : Ok, du coup y’a vraiment 2 parties dans votre boulot : Les numéros qui sont faits sur mesure pour un client qui en fait la demande et votre propre spectacle, prévu pour être joué dans une salle.
Gamgie : Y’a même une 3ème partie, qui est de la R&D, que ce soit au niveau du dev ou de la magie, et qui intègre les installations interactives. Ce sont des créations hors spectacle, qui sont plutôt dédiées à ce que les gens les utilisent. C’est toujours très ancré dans l’illusion et la magie, comme par exemple l’homme de sable.
Fougère : Vous pourriez faire des installations pour le Festival d’Avignon par exemple, installer quelque chose de complètement autonome pour que les gens jouent avec.
Moulla : Exactement. Cette installation (le sandman) a été exposée dans des musées, il a pas mal voyagé. On a aussi fait une installation pour les Nuits Blanches l’année dernière, ou un numéro avec une danseuse qui a son ombre qui se désolidarise d’elle et qui danse avec elle.
Winston : Un des trucs que je trouve passionnant dans ce boulot, c’est que ce qu’on produit représente à la fois un défi technique mais aussi un gros challenge artistique. Se débrouiller pour que ce soit assez beau pour que les gens oublient complètement la technique, c’est vraiment très gratifiant comme résultat.
Fougère : Mais est-ce qu’un mec avec un bon bagage technique pourrait comprendre comment ça marche ?
Gamgie : Oui, mais on a des feintes ! On a 2 publics qui nous tiennent à cœur : la communauté magie et la communauté dev. Le défi, c’est que pour chaque création, on atteigne une zone où on arrive à perdre tout le monde, et on y arrive assez souvent !
Fougère : Du coup ça marche comment ? Vous partez d’une techno pour faire un numéro, où vous avez une idée et vous allez chercher la techno qui va avec ?
Moulla : Ça dépend. La plupart du temps, quelqu’un va nous proposer une techno et nous on va chercher un moyen de l’exploiter. On ne veut pas utiliser toute les possibilités qui sont offertes, juste celles qui permettent de faire quelque chose de sympa. Ensuite, si on prend la démarche inverse, on va vouloir faire un effet de magie spécifique et on va chercher les technos qui existent et qui pourraient nous aider à le faire.
Gamgie : Ça rend le partenariat avec les entreprises super important, et aussi la veille technologique, pour repérer les trucs qui pourront nous servir. C’est assez cool de pouvoir aller piocher des idées et des technos à droite à gauche, ça nous permet de nous renouveler et d’innover dans plein de directions différentes.
Fougère : Au niveau des « vrais » spectacles, vous en avez déjà un ou pas ?
Moulla : On est en train de créer le premier, qui s’appelle Miracles. Il va être trop bien. On a déjà présenté les 30 premières minutes, et on continue de bosser sur la suite. On a prévu de le présenter l’année prochaine, et on va faire très attention à pas que ce soit des sketchs ou un enchaînement de numéros. On veut plutôt créer un « moment de magie » qu’on maintient tout le long, en restant fluide, avec beaucoup d’improvisation.
La deuxième partie de l'interview bientôt sur vos écrans !