Bad Taste
Quittons l’Amiga pour revenir dans le monde de l’Arcade avec Smash TV, sorti en 1990, un jeu totalement surréaliste. Fortement inspiré par The Running Man (l’excellent bouquin de Stephen King et l’adaptation cinématographique de très mauvais goût de Paul Michael Glaser), on jouait le rôle d’un participant d'un jeu télévisé assez spécial puisqu’il consistait à tuer des tonnes de gens avec diverses armes pour gagner des voitures et des magnétoscopes. Le tout était animé par un présentateur et quelques filles plantureuses. Le concept a été repris plus tard dans plusieurs jeux dont The Devil Inside, Manhunt et même une séquence de Flashback.
Road Rash est à la limite du mauvais goût mais ce serait dommage de ne pas en parler ici. Sorti en 1991 sur Megadrive, ce jeu de moto difficilement maniable d’Electronic Arts proposait aux joueurs de faire des courses de moto assez spéciales : outre le fait qu’elles se disputent sur des routes ouvertes au milieu de la circulation, il est possible de cogner les autres participants à grand renfort de coups de poing, coups de pied, chaines de vélo et autre matraque pour les faire tomber. La version Playstation et PC rajoute une bonne couche de gras avec des punks qui boivent de la bière et du bon gros metal. C'est dommage que la série n'ait pas survécu à l'époque 32 bits car il y aurait matière à faire quelque chose de très marrant sur next-gen. Mais EA a préféré recentrer le mauvais goût sur sa série Need For Speed. Vous voulez savoir ce que signifie Road Rash en anglais ? Recherchez l'expression dans google images : la grande classe !
Le summum du mauvais goût sur 16 bits a été atteint avec Mortal Kombat en 1992. D’abord sorti en arcade, ce jeu était la réponse de Midway à Street Fighter 2. Dans ce jeu de baston, les personnages sont digitalisés à partir de vrais acteurs. Soyons honnête : le gameplay est d’une rigidité sans nom et l’animation des personnages fait peur à voir. Le principal intérêt du jeu est la grosse dose d’hémoglobine présente. Le sang coule déjà à flot durant le combat mais Midway a ajouté le petit plus : les fatalities. Le vainqueur du combat a quelques secondes pour faire une manipulation au pad afin de tuer son ennemi dans une animation très gore qui utilise parfois le décor (genre une rangée de pics). Ces fatalities sont devenus la marque de fabrique de la série et sont devenus de plus en plus improbables et gores au fil des épisodes pour le plus grand plaisir des fans. Les versions consoles du premier sont censurées mais un cheat code permet à la version Megadrive de retrouver toute sa splendeur. La série a perduré, le gameplay s'est amélioré mais le mauvais goût est resté intact avec des personnages comme Bo Rai Cho (Deadly Alliance) qui vomit sur ses adversaires.
La même année, les PCistes découvraient Wolfenstein 3D, le premier FPS d’Id Software. La vue à la première personne supprime en partie la distance entre les joueurs et le jeu ce qui renforce la violence qu’on trouve dans la majorité des FPS. Wolf 3D n’était pas particulièrement violent malgré quelques belles flaques de sang mais c’était surtout le contexte qui dérangeait. En effet, on jouait un soldat des forces spéciales américaines qui était prisonnier d’un château allemand durant la seconde guerre mondiale. A la fin du troisième épisode, on devait même tuer Hitler. Durant tout le jeu, on pouvait admirer de nombreux portraits du dingue à moustaches gammées ainsi qu’un bon paquet de swastikas (il y a même un niveau entier du jeu dont les plans reproduisent sept fois ce symbole). Autant dire que le jeu a fait führer… On a accusé Id Software de faire l'apologie du fascisme. Histoire de se moquer de cette polémique, Doom 2 comporte un niveau caché qui utilise les assets de Wolf3D et qui est rempli de portraits d'Hitler. Mais le comble du mauvais goût est atteint dans l'autre niveau secret de Doom 2 : on y dézingue des enfants pendus, l'enfant en question était le héros des Commander Keen (une série de jeux de plate-forme créés par Id), ce qui a déclenché une nouvelle polémique.
Utilisant le même moteur que Wolf 3D (il devait même en être la suite), Rise Of The Triad est un des derniers jeux d’Apogee Software avant qu’ils ne changent de nom pour devenir 3D Realms. Dans ce FPS sorti en 1995, on flingue à tout va des membres d’une secte. Le jeu était relativement novateur : outre ses graphismes très réalistes, il permettait de sauter en utilisant des jump pads. Mais c’était surtout un gros défouloir : les munitions des armes de base (flingue, double flingue – une première ! – et mitraillette) étant illimitées, on tirait à tout va sur des ennemis qui encaissaient les balles en reculant avant de s’écrouler. Le jeu incluait des bonus rigolos comme les champignons hallucinogènes ainsi que des pièges comme des hachoirs géants qui découpaient aussi les ennemis en projetant yeux et membres dans tous les sens. Quand on quittait le jeu, ce dernier demandait confirmation sous forme d’une manière de se suicider du style « voulez-vous que la voiture plonge de la falaise ? ». Délicieux.
Au mileu des 90s, le lecteur de CD-Rom était démocratisé et les développeurs utilisaient pleinement ce support. Cela a notamment donné une vague de jeux qui ressemblaient plus à des films vaguement interactifs qu’autre chose. Composés presque uniquement de séquences vidéo, ils prenaient plusieurs CDs. Phantasmagoria (1995 - Sierra On-Line) et sa suite A Puzzle of Flesh (1996) prenaient respectivement 7 et 5 CDs. Bien que pourvus d’un scénario assez solide, les deux jeux étaient surtout une suite de séquences glauques, violentes, sanglantes ou à caractère sexuel à grand renfort de viols et de visites de clubs fétichistes. Cela fait moins nanar qu’un Night Trap mais ces jeux produisent le même effet qu’un Braindead : c’est tellement exagéré qu’on finit par en rire. Dans la même veine, je conseille plutôt Harvester, un point’n click sympa à l’humour corrosif mettant en scène un héros banal qui se réveille dans une ville remplie de tarés (la galerie de personnages est fabuleuse). Là encore, on a le droit à un déballage de sexe et de violence avec en plus des stéréotypes racistes. Le jeu proposait une palette étonnante de manière de mourir.