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[Rubrique littéraire] Du sang, des larmes et des pixels

miniblob par miniblob,  email  @ptiblob
C'est l'été, la saison idéale pour lézarder sur une plage en se plongeant dans un bouquin. Le sable blanc n'est qu'un lointain fantasme pour votre compte en banque ? Pas grave, vous pouvez toujours installer votre parasol au bord du premier bassin d'épuration venu, grâce à Jason Schreier vous trouverez toujours le moyen de rire du destin de pauvres bougres plus malchanceux que vous : les développeurs de jeux vidéo.
Certains titres de livre annoncent directement la couleur. En commençant Le Rouge et le Noir, on sait tout de suite qu'on aura affaire à une biographie de Jeanne Mas. En intitulant son bouquin Du sang, des larmes et des pixels (ou plutôt Blood, Sweat, and Pixels en VO) Jason Schreier envoie d'emblée un message : le développement de jeu vidéo n'a rien d'un long fleuve tranquille. C'est plutôt un processus éprouvant qui brise un peu au passage ceux qui y consacrent leur vie. Histoire d'en prendre l'ampleur, Jason Schreier, rédacteur sur un obscur site consacré au gaming façon koala, ne cherche même pas à établir un idéal type du développement d'un jeu. Au lieu d'établir des généralités, il revient plutôt sur dix exemples précis histoire d'illustrer la diversité des situations et les différentes facettes de la précarité du métier.

Question diversité, on peut dire qu'on est servi. Jason Schreier est aussi bien allé questionner les développeurs bossant sur de gros AAA que de petits indé travaillant dans leur coin. Chaque chapitre étant consacré à un jeu en particulier, on peut ainsi très bien passer d'une partie consacrée à Uncharted 4 et aux hordes d’employés de Naughty Dog , à une autre focalisée sur Stardew Valley, œuvre du solitaire Eric Barone. Mais finalement, là où la diversité se fait le plus sentir, c'est dans le fait que le livre ne se résume pas à une enfilade gratuite de success stories.



En abordant Diablo 3 par exemple, il aurait été facile de le décrire comme une réussite vu simplement pas le biais de ses ventes phénoménales à sa sortie. Mais au lieu de ça, Jason Schreier débute plutôt son récit par la fameuse erreur 37 avant de raconter la laborieuse remontée des enfers des équipes de Blizzard qui ont patiemment corrigé les nombreux problèmes du titre. Et parfois le miracle ne vient pas, comme avec Destiny qui rate le coche, ou pire encore Star Wars 1313 tué dans l'oeuf alors que les planètes semblaient alignées pour assurer sa réussite. Globalement, c'est toujours un regard non-complaisant qui est posé sur le développement de ces différents jeux, mettant invariablement en avant les grains de sable qui ont ou qui auraient pu faire dérailler toute la machine.

Vous l'aurez compris, on n'est pas en face d'un bouquin bêtement optimiste destiné à faire naître des vocations. Il pose plutôt un éclairage assez brut et cru sur cette industrie et ses mauvaises habitudes comme les démo E3 pipautées, les reports de lancement et les coupes créatives liées à des impératifs économiques. Mais le plus dur reste sans doute la place de l'humain dans cette machine : s'il faut chercher une constante dans toutes les situations décrites, ça serait sans doute la pratique du crunch, ces phases de travail éreintantes qui ne laissent aucune place au repos ou à la vie de famille.

En un mot, ce n'est pas le genre de livre qui va vous faire naître des étoiles dans les yeux. D'ailleurs ne vous attendez pas à être charmé par cette prose : entre les diverses coquilles et les lourdeurs de style, on est verni. On ne sait pas trop si on doit en tenir rigueur à la traduction ou à l'auteur original (après tout, les journalistes spécialisés du jeu vidéo sont rarement de grandes plumes, relisez cet article depuis le début si vous voulez vous en convaincre), mais ça rend la lecture parfois un peu pénible. Un désagrément qui est toutefois vite pardonné vu la richesse du bouquin et sa capacité à nous plonger dans les coulisses d'une industrie qui cultive habituellement sa part de mystère.
 
Du sang, des larmes et des pixels, Jason Schreier, Mana Books, 18 €
En s'attaquant aux conditions concrètes de développement qui se cachent derrière certaines licences de jeu vidéo parmi les plus connues, Jason Schreier dépeint une industrie bigarrée et exigeante qui laisse peu d'occasions de souffler à ses malheureux créateurs. En gros, Jason nous rappelle qu'en pressant gentiment X on écrase aussi d'honnêtes travailleurs par la même occasion, et que parfois ils en redemandent.
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