Arx Fatalis
Let the Sunshine in…
Le monde d’Arx a bien changé… Fini les petites promenades au bois de boulogne à quatre heures du matin, les sorties au parc avec yoyo le rat géant (n’y voyez aucune connotation politique) et les écumages de parcmètres dans les montagnes : le monde tel que vous le connaissiez est mort. Entassés dans les profondeurs de la terre comme des clodos dans le métro, les hommes, rats, orcs, trolls et autres joyeusetés essaient tant bien que mal de cohabiter dans l’obscurité des souterrains qui sont désormais leur seul salut. La faute à qui, la faute à quoi ? Au soleil. Apparemment, ce dernier en aurait eu assez de nous voir lui tourner autour, et serait allé se vider une boite de lexomil dans le bar de la galaxie voisine. Et pendant ce temps, nous, on se les gèle. Du coup, plus personne n’ose s’aventurer à la surface, de peur de se transformer en sorbet géant. Tous sauf les rares téméraires qui prennent leur courage à deux mains pour partir à la recherche des rares survivants subsistant encore à l’air libre. Et le joueur dans tout ça ? Ca arrive…
Comme à chaque fois que c’est le bordel, un mec mal intentionné cherche à empirer encore plus la situation pour le fun, les yeux révulsés et le rire démoniaque prêt à retentir (parait que c’est un tic). Le lourd en question se nomme Akba, autoproclamé Dieu de la Terreur. Le Akba en question a vraiment les nerfs, et il menace de réduire le monde d’Arx en fumée. Pour enrayer la malédiction, le peuple espère voir arriver une sorte de messie, élu des dieux, pour les sauver de l’enfer éternel. Et évidemment, ce pigeon c’est vous, le joueur. L’aventure commence alors que vous vous éveillez dans une cellule miteuse de la zone Orque, l’occasion de faire un premier contact avec la maniabilité. Arx Fatalis est un RPG pure souche, loin des concessions effectuées par un Deus Ex 2 pour achalander le grand public. Une pression sur un bouton permet d’accéder aux options du personnage, avec l’inventaire, le cahier des sorts, les stats etc. L’évolution des statistiques et des skills se fait au fur et à mesure du jeu, selon nos faits et choix. Ainsi, si vous utilisez plutôt les épées fines que les grosses massues, l’évolution en tiendra compte (en gardant en tête que les déterminations majeures sont déjà fixées lors du choix de la classe, en début de partie). Mais laissons là les considérations administratives et attardons nous un peu plus sur le jeu lui-même.
Grottham-City
L’univers d’Arx Fatalis est vraiment très sombre. Les cavernes sont pouilleuses, les murs tachés de sang ou de moisissure, et les couloirs ne sont éclairés que par de petites torches qui jalonnent les sous terrains. Les personnages sont tous vieux, mal rasés, fatigués et généralement blessés… Tout est fait pour que l’on se sente mal à l’aise dans ce monde confiné, et c’est vraiment réussi. Sans compter que sa mise en image est très convaincante : les textures sont fines et détaillées, la qualité des personnages dépasse de loin celle de Morrowind, et un très gros travail a été fait sur le son : les musiques, bien que discrètes, sont tout à fait dans le ton, et les bruitages exemplaires. Tout serait donc parfait de ce point de vue là si l’animation n’était pas si catastrophique. Arx Fatalis bat Morrowind à plate couture en ce qui concerne le framerate : ça rame tout le temps, et parfois copieusement. Alors s’il semble évident que le moteur nécessitait une vraie refonte pour tourner correctement et que ce n’était pas financièrement envisageable, il est quand même scandaleux de voir qu’un jeu vieux de plus de trois ans se permet de patauger à ce point. Alors bon, ça reste bien évidemment jouable, et ça ne gâchera pas outre mesure votre expérience de jeu, mais à 60€ la boîte, on attend quand même un minimum… Bref, passons.
Comme dit un peu plus haut, votre rôle va vite se révéler être celui du sauveur d’Arx, et si le personnage se montre au début assez réticent à aider les autres, on ne lui demandera de toutes façons pas longtemps son avis, donc autant vous y habituer, vous allez passer pas mal de temps à jouer au larbin de service. La rançon de la gloire. Les quêtes se succèdent les unes après les autres, leur réussite assurant l’avancement du scénario. Les rebondissements sont d’ailleurs plutôt bien construits, et il est très appréciable de voir que les NPC sont légions. C’est qu’on se sentirait presque seul, dans ce dédale de souterrains en ruines ! Et contre toute attente, s’il est un sentiment totalement absent d’Arx Fatalis, c’est bien l’ennui, la lassitude. Alors qu’un jeu comme Morrowind, encore lui, pourtant ultra libre et ouvert, finissait par saouler à force de nous faire bouffer des kilomètres dans un monde figé et désert, Arx Fatalis, lui, n’en finit pas d’étonner et de surprendre de par l’excellence de son level design. Rares sont les jeux dont les niveaux sont aussi bien construits, et aussi intéressants à explorer. Les chemins sont tortueux, les cartes souvent énormes et pleines de petites zones cachées et de recoins à découvrir… un régal.
Un jeu où l’on peut manger du rat !
Bon, rien que là, je sens que ce jeu vous fait envie. Ne niez pas, je le sais. Mais vous n’êtes pas au bout de vos peines, parce qu’Arx Fatalis a encore bien des surprises à révéler. Pour résumer, ce jeu est simplement trippant, dans le sens où tout vous incite à plonger dans son univers et à y prendre du plaisir. Le gameplay est d’ailleurs complètement construit dans ce sens, et l’on sent bien que les développeurs sont avant tout des joueurs qui veulent se faire plaisir. Ainsi, à la manière d’un Deus Ex où tout ou presque est activable, jusqu’aux robinets des toilettes ; tout dans Arx Fatalis est pensé pour que le joueur se sente impliqué et s’amuse. Le système de combats, par exemple, permet de tirer son épingle du jeu sans nécessairement avoir des armes monstrueuses ou des heures de jeu au compteur, contrairement à un autre RPG de la même machine (je ne dis même plus le nom tellement ça semble évident) dont les premiers affrontements étaient terriblement frustrants. Je tiens d’ailleurs à souligner le fait que l’IA, bien que sommaire, soit bien pensée : les ennemis blessés s’enfuient, appellent de l’aide, vont se cacher, battent en retraite etc. Autre réjouissance, le héros pour saisir tout un tas d’armes et de boucliers divers. Ainsi, il est possible de se battre avec un Os humain. De même, presque tous les objets du jeu sont manipulables, et permettent par exemple d’attirer un ennemi en les jetant dans la direction souhaitée.
Dans un autre registre, signalons aussi qu’il est possible de faire cuire ses propres viandes ! Par exemple, plutôt que de se trouver face à des situations ridicules comme des cadavres de rats bourrés de fioles de vie, le héros se fait des « steaks de rats crus » qu’il peut faire cuire au feu de bois, histoire de se refaire une santé pour pas un rond. Je sais pas vous, mais moi ce genre de petits détails a tendance à me mettre de bonne humeur.
Bon alors ils sont bien gentils chez Arkane avec leurs viandes exotiques, mais il serait temps de passer aux choses sérieuses : la magie, car tout le monde sait qu’un RPG sans magie n’est pas vraiment un RPG. Heureusement pour eux, Arx Fatalis ne déroge pas à la règle, et fait même mieux : il la transcende. Le système de magie est très simple. Il fonctionne sur un système de Runes qui se combinent entre elles, à la différence près que les invocations se font à la main : le joueur doit « dessiner » le symbole de chaque rune à l’aide de la croix directionnelle pour invoquer son pouvoir en effectuant un combo. Alors bon, c’est sûr que le système prenait une autre dimension sur PC, avec la souris (faute de rat), mais quand même, c’est toujours plus sympa qu’une simple assignation à un bouton. Les pouvoirs sont très variés, et vont de la magie de combat à des sorts plus « utilitaires », comme la possibilité d’allumer des torches et autres feux de bois. Et passer l’aspirateur aussi, mais ça c’est un peu après. Il existe aussi des « sorts éclairs », des runes à utilisation unique qui disparaissent après invocation. Qu’on se le dise, on ne possède un sort que quand on en possède toutes les runes.
Un RPG qu’il est bien
Bon, logiquement, arrivé à ce stade du texte, je suis sensé vous énumérer les points noirs du jeu… Sauf que là, je sèche. Le framerate, on en a déjà parlé, et je ne vais pas en rajouter une couche, je pense que vous avez bien compris l’affaire. Et pour ce qui est du reste, je crois que je serais vraiment malhonnête de ne pas vous dire, très simplement, qu’Arx Fatalis est juste le meilleur RPG existant sur Xbox, et sûrement un des meilleurs RPG jamais conçus tout court. Rarement jeu n’aura été si soigné, et surtout si équilibré. Le gameplay est l’exact balance entre accessibilité et richesse, et le jeu regorge de petits détails, sans pour autant nous étouffer sous une masse d’informations, et hormis le framerate, c’est techniquement très acceptable, suffisamment en tous cas pour immerger le joueur dans son univers. Bon, en fait, je ne sais plus comment vous dire ce que je veux vous dire autrement qu’en le disant, alors je le dis : sortez de chez vous, maintenant, courez le plus vite possible chez votre revendeur et achetez dix boîtes d’Arx Fatalis. Depuis le temps qu’on attend un vrai RPG sur console, merde alors, on aurait tort de se priver ! Allez, pour la peine, je vais me taper un petit steak de rat.