Alan Wake
Alan Wake est un écrivain à succès qui traverse une période difficile de sa vie, tant au point de vue professionnel que personnel : la campagne de promotion de son nouveau bouquin l'épuise et son mariage bat de l'aile. Pour s'aérer l'esprit, le couple de new-yorkais décide donc de partir se mettre au vert dans la petite bourgade de Bright Falls, un bled paumé du nord-ouest des Etats-Unis. À peine arrivé, Alan va toutefois vite se rendre compte que ce patelin n'est pas aussi tranquille qu'il y parait, surtout quand sa femme disparait mystérieusement, qu'il se réveille une semaine plus tard après une accident de voiture sans aucun souvenir de ce qui s'est passé durant les derniers jours, et qu'il se fait attaquer par des autochtones agressifs tentant de lui planter divers objets contondants dans la tête.
Je ne m'appesantirai pas plus sur le scénario, non pas que celui-ci soit anecdotique, mais au contraire car ce scénario et la narration dans son ensemble sont tout simplement les gros points forts du jeu. Découpé en épisodes, débutant à chaque fois par un "Previously on Alan Wake..." piqué aux séries télé, le jeu vous fera suivre le périple du malheureux écrivain qui en tentant de retrouver sa femme, se demandera si il n'est pas en train de sombrer dans la folie et si toutes les horreurs qu'il croise sont bien réelles. La progression sera ponctuée par des commentaires d'Alan en voix off, mais surtout par des pages d'un manuscrit que vous trouverez au fur et à mesure, un manuscrit qu'Alan ne se souvient pas avoir écrit relatant les événements auxquels il se retrouve confronté.
Voilà pour l'enrobage scénaristique ; intéressons-nous maintenant au gameplay. Alan Wake se joue comme n'importe quel third person shooter, avec toutefois une petite subtilité : avant de pouvoir refaire le portrait des vilains d'une bonne balle dans la tête, il faudra chasser la protection sombre qui les entoure. Et pour ce faire, votre lampe de poche sera votre meilleure amie : quand un ennemi vous tombe dessus, il faudra donc l'éclairer quelques instants pour faire sauter cette protection, avant de lui tirer dessus pour le tuer pour de bon. La lumière jouera donc une rôle plus qu'essentiel tout au long de l'aventure, et la moindre source de lumière fera office de havre de paix après la longue traversée d'une forêt plongée dans l'obscurité et infestée de bûcherons possédés. L'armement est plutôt limité et au cours du jeu vous ne pourrez mettre la main que sur un pistolet, un fusil de chasse, un fusil à pompe et une carabine. Ici, pas question de lance-roquettes, mais vous pourrez tout de même trouver l'équivalent local du BFG : un petit pistolet lance-fusée, qui en un tir bien placé pourra venir à bout du moindre groupe d'ennemis. Vous pourrez également dégotter des feux à main, pratiques pour tenir les ennemis à distance, ou des flashbangs, aussi efficaces que le lance-fusée.
Voilà pour les bases du gameplay. Le problème, c'est que ces bases couvrent environ 95% du gameplay d'Alan Wake, et qu'on se retrouve bien vite à faire toujours la même chose. Certes, c'est le cas pour la plupart des autres jeux du genre, mais cette répétitivité se fait ici particulièrement sentir. Rien ne viendra jamais briser réellement la monotonie : certes, il faudra bien fouiller les environnements pour mettre la main sur toutes les pages du manuscrit ou les thermos de café, écouter toutes les émissions de télé et de radio ou encore lire tous les panneaux d'information, mais tout le monde n'aime pas forcément passer au peigne fin le moindre centimètre carré d'une carte, surtout sans objectif autre que de faire grimper son Gamerscore. Les environnements traversés seront globalement toujours les mêmes (des grandes forêts de pins qui nous font croire qu'on a atterri dans un épisode de Stargate), les ennemis rencontrés sont toujours les mêmes (des péquenauds possédés), les différentes armes se comptent sur les doigts de la main...
Autant dire que si vous n'accrochez pas au scénario, ce n'est pas le gameplay, finalement très basique, qui vous incitera à continuer de jouer. D'autant plus que si l'on se souvient qu'à la base Alan Wake devait se dérouler dans un monde ouvert, Remedy a entretemps revu sa copie pour nous livrer un jeu finalement très linéaire. Les deux derniers épisodes donnent un sentiment d'une aire de jeu un peu plus vaste, mais la majorité de l'aventure vous fera parcourir de longs couloirs bordés de sapins. Du coup, on se demande un peu à quoi peu bien servir le radar vous indiquant la direction de l'objectif à atteindre, puisqu'il suffit en général d'avancer tout droit vers la prochaine source de lumière. Et ce ne sont pas les quelques passages à bord de voitures, pas particulièrement passionnant, qui viendront donner un peu d'air : les couloirs seront certes un peu plus larges et goudronnés, mais toujours délimités par des sapins ou des fossés.
L'autre grand point sur lequel on attendait Alan Wake au tournant, c'est sur sa réalisation. Les anciens demomakers de Remedy nous ont habitués en seulement deux jeux à nous en mettre plein les yeux, et on attendait donc de voir ce qu'ils allaient nous proposer avec leur nouveau titre qui, lors de ses rares apparitions durant les longues années de son développement, n'a pas manqué de nous faire rêver. De ce côté, le pari est réussi : les environnements sont magnifiques, les personnages sont bien modélisés, mais ce sont surtout les divers effets de lumière et de particules qui mettent sur le cul : jamais des éclairages, de la brume, de la fumée, n'auront semblé aussi réels dans un jeu vidéo. Autant dire que ces quelques effets parviennent à eux seuls à renforcer, pour ne pas dire sublimer, encore un peu l'ambiance déjà très travaillée du jeu.
Tout n'est néanmoins pas parfait. Ainsi, on pourra regretter que la résolution soit si faiblarde (le jeu ne tourne même pas en 720p, mais à au moins le mérite de proposer une fluidité quasi-parfaite du début à la fin de l'aventure), que les animations faciales des personnages ne soient pas plus travaillées, que certaines textures manquent un peu de relief et semblent arriver directement de Max Payne 2... Rien de vraiment dramatique, mais on se retrouve avec "seulement" un très beau jeu, là où on espérait depuis des années un titre vraiment magnifique, nouveau mètre-étalon qui mettrait tout le monde d'accord pour les années à venir. La faute aux consoles, diront certains - et on ne pourra pas leur donner forcément tort, tant tous ces défauts semblent causés par les limitations techniques de la machine et non pas par un manque de talent des développeurs. Côté bande son en revanche, on frôle la perfection : la VF est pour une fois vraiment convaincante, les sons d'ambiance vous feront frissonner et gentiment sursauter, et les diverses musiques sont toutes de très bonnes factures.