Darwinia
Dans un univers à deux doigts du réel, vous serez guidé au départ par un certain Docteur Sepulveda, inventeur malgré lui de Darwinia, créé sur un parc de consoles invendues.
Disponible pour Windows, Linux et Mac, ce superbe jeu est vendu en ligne sur le site du développeur, où l’on peut le commander sur une superbe galette, mais aussi sur la plateforme de téléchargement Steam.
Récemment primé lors de l’IGF, Darwinia y remporta non seulement le premier prix dans la catégorie « Innovation in Visual Art » et « Technical Excellence », mais aussi le prix principal : le « Seumas McNally Grand Prize ». Leur voyage aux US, alors qu’ils n’y croyaient pas vraiment, est relaté sur leur site officiel.
Publié initialement sur JeuxVideoPC, cet article a été un peu retravaillé afin de paraître sur Factor aujourd’hui.
Sepulveda est de retour!
Près de vingt ans après le fiasco des Protologic 68000, la console soi-disant révolutionnaire qui fut un fiasco complet (pas une seule unité ne fut vendue), le Professeur Sepulveda a repris contact avec la presse afin d'exposer ses travaux actuels sur l'intelligence artificielle.
Un peu sceptique au vu de la réputation du Professeur Sepulveda (lors de la présentation du Protologic 68000 à la presse en 1986, la console refusa résolument de démarrer, et explosa lors de la démonstration!), je n'ai pas répondu tout de suite au premier mail d'invitation, reçu il y a environ un an.
Puis, la presse générale s'est mise à reparler du Professeur, et surtout de ses travaux. En reliant les Protologic invendus, il a créé un environnement virtuel, dans lequel il a pu effectuer des recherches sur l'intelligence artificielle. Après quelques années, il fut capable de créer une entité (qu'il appelle affectueusement Darwinien) capable de réfléchir, de réagir à certains événements, une entité vivante, quoi!
Actuellement, ces entités sont encore assez basiques, mais d’après Sepulveda, chaque Darwinien est unique. Chacun possède une empreinte digitale (que le Professeur appelle âme) qui, à sa mort, retourne au centre de l'environnement virtuel, afin d'être réutilisé pour un nouveau Darwinien.
La semaine dernière, j'ai donc répondu au mail d'invitation pour visiter le parc, que le Professeur m'avait envoyé. En m'excusant pour mon retard, je lui expliquai mon intérêt pour ses recherches, car l'intelligence artificielle est une composante essentielle d'un bon jeu vidéo. Et c'est ainsi qu'il y a deux jours, je reçus le code personnel, ainsi que le CD qui permet d'entrer dans ce monde virtuel.
Somebody Set Us Up The Bomb!
Ce qui devait arriver arriva... en entrant dans le domaine virtuel, je remarque que quelque chose ne tourne pas rond. La communication est entrecoupée de textes bizarres, et en arrivant à l'entrée du parc, je me retrouve devant une île vide, sur laquelle ne se trouve qu'une dizaine de Darwiniens, que des créatures inconnues (sortes de serpents rouges constitués de triangles) attaquent.
Tout à coup, je reçois un message à travers l'interface du jeu : c'est Sepulveda. Il me parle d'une catastrophe, d'un virus qui aurait réussi à entrer au sein de son univers virtuel, et qui serait en train de tout détruire. Il me demande alors de l'aider à éradiquer le virus de l'intérieur pendant qu'il tentera de son côté d'améliorer les Darwiniens pour qu'ils puissent se défendre face à l'envahisseur. Heureusement, l'interface est très intuitive: je me déplace dans ce monde virtuel dans une sorte de caméra libre, que je peux déplacer à l'aide des touches Z,Q,S,D, et peux diriger ma vue à l'aide de la souris, comme dans les jeux vidéo !
Il m'explique ensuite qu'en dessinant un triangle à l'aide de la souris, je peux créer un programme « squad », composé de guerriers équipés de lasers. Un autre symbole me permet de créer des programmes « ingénieurs » qui tenteront de récupérer des bâtiments, afin que les Darwiniens puissent se déplacer d'île en île pour tenter de reconstruire leur monde. Il m’explique aussi que cette configuration gestuelle n’est plus définie par défaut dans les versions plus récentes du client de Darwinia, certains utilisateurs de Windows s’étant plaints d’incompatibilité. Il a donc créé une nouvelle interface gérable à la souris, et où il suffit de cliquer sur le type de programme que l’on veut créer pour qu’il apparaisse dans le monde virtuel.
Au fil du temps, Sepulveda m'en apprend un peu plus sur son monde. Il m'explique que, même si je ne peux diriger les darwiniens directement, ils sont capable de réaliser de grandes choses: utiliser des machines présentes dans leur monde afin de construire de nouvelles armes, ou de gérer la population de Darwiniens. Alors que je m’efforce de retenir les flots incessants de virus rouges, Sepulveda travaille de son côté sur l'amélioration de son univers, en développant de nouveaux types d'armes (grenades, roquettes,...) ou en améliorant les programmes existants (le squad de base comporte trois guerriers, et il peut y avoir jusqu'à six guerriers dans un squad version 4.0).
Evidemment, chaque programme que je crée (squad ou ingénieur) consomme de la mémoire, et dans sa configuration de base, le gestionnaire des tâches de l'univers de Sepulveda n'accepte que trois programmes à la fois. On peut passer d'un programme à l'autre en tapant ALT-TAB (uniquement dans la configuration « gestuelle », et terminer l'exécution d'un programme en appuyant sur CTRL-C. Ces raccourcis clavier renforcent le sentiment d'immersion, et je félicite Sepulveda d'avoir gardé ces raccourcis classiques, plutôt que d'inventer des combinaisons de touches inhabituelles.
All Your Base Are Belong To Us
L'univers et le scénario sont tout à fait cohérents, et on sent que les développeurs ont passé du temps à nous pondre quelque chose de construit dans un nouvel univers, plutôt que de tomber dans les créneaux archi-utilisés tels que le médiéval-fantastique ou la seconde guerre mondiale. Ici, nous nous trouvons à l'intérieur d'un supercalculateur bricolé à partir d'une série de consoles, et qui contient un univers virtuel, dans lequel évoluent des entités dotées d'une intelligence artificielle propre. Au fil du temps, on suit les améliorations de ces programmes grâce aux travaux de Sepulveda. On découvre des anecdotes liées aux travaux du Docteur, la façon dont les Darwiniens ont réagi lorsqu'un jour, il remplaça par mégarde la texture du ciel par une photo d'identité... des petits détails qui rendent cet univers cohérent et attachant!
Les graphismes sont tout à fait en phase avec l'univers. Dans les années 80-90, on imaginait des parcs de réalité virtuelle comme un univers de formes basiques, constituées de triangles. Les couleurs sont similaires à celles que l'on voit dans le film Tron, ou dans le jeu Tron 2.0. Pourtant, le moteur graphique utilise la technique des shaders afin de donner plus de « réalisme » au jeu, pour un résultat final magnifique. Les graphismes ne plairont peut-être pas à tout le monde, mais collent tout à fait à l'esprit du jeu.
Le Docteur Sepulveda joue non seulement le rôle du narrateur, mais est aussi là pour fournir une aide en fonction de vos actions. L'aide est parfaitement intégrée, et il y a moyen de la désactiver si nécessaire. La phase d'apprentissage est tout à fait correcte, même si l'on peut parfois regretter que les premières missions se ressemblent un peu. En revanche, dès qu'on a repris le contrôle de plusieurs machines, cela devient un véritable plaisir que d'éradiquer tous ces virus!
A ce sujet, je tiens a préciser que la version actuelle de Darwinia n'utilise plus par défaut les dessins de symboles pour créer des unités. Heureusement, il reste possible de choisir la configuration gestuelle à partir du menu des options.
Où trouver une démo, où l'acheter?
Comme Introversion Software est un studio britannique indépendant, ils ont uniquement publié le jeu dans leur pays. On peut cependant commander des versions boîtes sur le site officiel de Darwinia, ce qui donne aussi accès aux versions téléchargeables du jeu (non-Steam). En achetant le jeu sur leur site, vous aurez aussi accès aux versions Mac et Linux du jeu. Pour les amateurs de l’usine à gaz, il est aussi possible de l’acheter via Steam, mais cet achat n’inclut pas les versions des autres plateformes.
Darwinia est donc une petite bombe, un OVNI vidéoludique, qui plaira non seulement aux amateurs de RTS, mais aussi aux joueurs qui veulent redécouvrir pourquoi ils jouent: pour le fun, pour se retrouver face à un jeu original, et pas pour rejouer aux mêmes clones chaque année!