ACTU
(Impressions) The Banner Saga
The Banner Saga, le RPG tactique de Stoic Studios qui avait séduit les backers Kickstarter à hauteur de plus de 700 000$ en avril 2012, sort dans 8 jours. On a prévu d'en faire le test, mais comme les développeurs nous ont gentiment envoyé une version preview presse avec la caisse de vin californien avant les fêtes, on ne résiste pas à l'envie de vous dire ce qu'on a pensé de ce remix numérique et enneigé de notre tapisserie de Bayeux, sous la forme d'une "preview/premières impressions" totalement bâtarde.
Je n'ai passé que quelques heures dans The Banner Saga mais le moins qu'on puisse dire c'est qu'elles ont été particulièrement intenses. Ce qui m'a le plus marqué dans cette prise de contact avec le jeu, c'est le dynamisme de la narration. Stoic nous plonge tout de suite dans le feu de l'action et à peine a-t-on fait connaissance avec les protagonistes du premier chapitre que les évènements s'enchaînent, brouillant les cartes et introduisant de nouvelles factions entretenant des relations troubles les unes avec les autres. C'est dans ces conditions de compréhension incertaine qu'il nous faut prendre les premières décisions, vaguement conscient de leur impact politique mais totalement dépassé par leur portée et leurs enjeux. À peine commence-t-on à avoir une vue d'ensemble un peu moins floue que Stoic nous promène à l'autre bout de la carte pour introduire de nouveaux personnages dans une situation toute autre. Avec cette seconde trame, les choses semblent plus claires mais très vite on se retrouve à diriger malgré nous une fuite en avant à tombeau ouvert, dans laquelle on ne connaît aucun répit. Entre les combats, dont la difficulté est déjà relevée même en début de partie, le système de gestion de ressources et de héros via le prestige, on se retrouve sans arrêt à hésiter, peser le pour et le contre, et prendre des décisions sans être vraiment sûr d'avoir fait le bon choix.
Et c'est là que The Banner Saga prend toute sa dimension et touche à la quintessence du RPG tel que je le conçois : il n'y a pas de bonne ni de mauvaise décision. Plus que jamais c'est le personnage que l'on joue, tel qu'on l'imagine et tel qu'on l'a inventé, qui va réagir en fonction du contexte, effaçant ainsi notre "moi" de joueur qui se dit que s'il répond ça il va gagner ça (chose qu'on ignore totalement, de toute façon). Veut-on jouer un personnage avide de pouvoir et frustré d'être toujours dans l'ombre de son chef de clan ? Veut-on jouer celui qui a dû remplacer son ami blessé parce que personne d'autre n'avait le courage de le faire, incertain lui-même de sa capacité à diriger ? Qu'il soit arrivé au pouvoir par envie ou par hasard, quelle forme d'autorité sera la sienne ? Comment va-t-il mener ce peuple affamé et errant sans autre but clair que survivre quelques jours de plus à une sombre menace sortie du fond des âges ? La narration s'arrange toujours pour nous laisser assez de liberté pour continuer de façonner, dialogue après dialogue, le caractère des personnages dont on a le contrôle.
Je pense que c'est en jouant comme ça qu'on peut pleinement profiter de The Banner Saga, en faisant son roleplay tout seul devant son écran. J'ai joué “à la roguelike”, sans jamais recharger la partie, parce qu'un combat qui s'est mal déroulé, un choix qui s'est avéré maladroit, une dépense qu'on va finalement regretter, tout cela contribue à faire du jeu autre chose qu'une succession de dialogues entrecoupés de combats et de phases de récupération. Au lieu de cela, on va écrire l'histoire de ces personnages dont on a esquissé les traits et que l'on va accompagner en tâchant, tel un narrateur bienveillant, de leur laisser le beau rôle. The Banner Saga est destiné à ceux qui conçoivent un jeu comme un support à leur imagination, un peu comme un livre dont l'histoire serait composée de fragments astucieusement placés aux moments-clefs et dont il faudra inventer le reste.
Est-ce le premier jeu qui nous invite à vivre ce genre d'expérience ? Probablement pas, mais sa façon de s'y prendre, jonglant entre l'économie d'un jeu indépendant et l'ambition de proposer une narration centrale mais non dirigiste, est particulièrement originale. Ajoutez à cela que le monde dans lequel on évolue a manifestement été pensé dans les moindres détails : il suffit d'ouvrir la carte interactive du jeu pour s'en rendre compte. On pourra faire quelques reproches à cette version presse de The Banner Saga, notamment une interface un peu trop spartiate et une lisibilité des combats parfois délicate, mais les amateurs de jeu de rôle et de tour par tour tactique devraient être comblés, dès lors qu’ils sont en mesure d'accepter d'être malmenés par des évènements qui les dépassent, à un rythme effréné.
Je n'ai passé que quelques heures dans The Banner Saga mais le moins qu'on puisse dire c'est qu'elles ont été particulièrement intenses. Ce qui m'a le plus marqué dans cette prise de contact avec le jeu, c'est le dynamisme de la narration. Stoic nous plonge tout de suite dans le feu de l'action et à peine a-t-on fait connaissance avec les protagonistes du premier chapitre que les évènements s'enchaînent, brouillant les cartes et introduisant de nouvelles factions entretenant des relations troubles les unes avec les autres. C'est dans ces conditions de compréhension incertaine qu'il nous faut prendre les premières décisions, vaguement conscient de leur impact politique mais totalement dépassé par leur portée et leurs enjeux. À peine commence-t-on à avoir une vue d'ensemble un peu moins floue que Stoic nous promène à l'autre bout de la carte pour introduire de nouveaux personnages dans une situation toute autre. Avec cette seconde trame, les choses semblent plus claires mais très vite on se retrouve à diriger malgré nous une fuite en avant à tombeau ouvert, dans laquelle on ne connaît aucun répit. Entre les combats, dont la difficulté est déjà relevée même en début de partie, le système de gestion de ressources et de héros via le prestige, on se retrouve sans arrêt à hésiter, peser le pour et le contre, et prendre des décisions sans être vraiment sûr d'avoir fait le bon choix.
Et c'est là que The Banner Saga prend toute sa dimension et touche à la quintessence du RPG tel que je le conçois : il n'y a pas de bonne ni de mauvaise décision. Plus que jamais c'est le personnage que l'on joue, tel qu'on l'imagine et tel qu'on l'a inventé, qui va réagir en fonction du contexte, effaçant ainsi notre "moi" de joueur qui se dit que s'il répond ça il va gagner ça (chose qu'on ignore totalement, de toute façon). Veut-on jouer un personnage avide de pouvoir et frustré d'être toujours dans l'ombre de son chef de clan ? Veut-on jouer celui qui a dû remplacer son ami blessé parce que personne d'autre n'avait le courage de le faire, incertain lui-même de sa capacité à diriger ? Qu'il soit arrivé au pouvoir par envie ou par hasard, quelle forme d'autorité sera la sienne ? Comment va-t-il mener ce peuple affamé et errant sans autre but clair que survivre quelques jours de plus à une sombre menace sortie du fond des âges ? La narration s'arrange toujours pour nous laisser assez de liberté pour continuer de façonner, dialogue après dialogue, le caractère des personnages dont on a le contrôle.
Je pense que c'est en jouant comme ça qu'on peut pleinement profiter de The Banner Saga, en faisant son roleplay tout seul devant son écran. J'ai joué “à la roguelike”, sans jamais recharger la partie, parce qu'un combat qui s'est mal déroulé, un choix qui s'est avéré maladroit, une dépense qu'on va finalement regretter, tout cela contribue à faire du jeu autre chose qu'une succession de dialogues entrecoupés de combats et de phases de récupération. Au lieu de cela, on va écrire l'histoire de ces personnages dont on a esquissé les traits et que l'on va accompagner en tâchant, tel un narrateur bienveillant, de leur laisser le beau rôle. The Banner Saga est destiné à ceux qui conçoivent un jeu comme un support à leur imagination, un peu comme un livre dont l'histoire serait composée de fragments astucieusement placés aux moments-clefs et dont il faudra inventer le reste.
Est-ce le premier jeu qui nous invite à vivre ce genre d'expérience ? Probablement pas, mais sa façon de s'y prendre, jonglant entre l'économie d'un jeu indépendant et l'ambition de proposer une narration centrale mais non dirigiste, est particulièrement originale. Ajoutez à cela que le monde dans lequel on évolue a manifestement été pensé dans les moindres détails : il suffit d'ouvrir la carte interactive du jeu pour s'en rendre compte. On pourra faire quelques reproches à cette version presse de The Banner Saga, notamment une interface un peu trop spartiate et une lisibilité des combats parfois délicate, mais les amateurs de jeu de rôle et de tour par tour tactique devraient être comblés, dès lors qu’ils sont en mesure d'accepter d'être malmenés par des évènements qui les dépassent, à un rythme effréné.