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Furi : genèse d’un projet maîtrisé
Lors de notre passage chez Swing Swing Submarine il y a quelques semaines, nous avions également rencontré leurs colocs The Game Bakers, et plus précisément Emeric Thoa, directeur créatif, en train de donner le dernier coup de collier sur son bébé Furi. Nous avons pu en apprendre un peu plus sur le développement du tube de l’été vidéoludique.
The Game Bakers, c’est donc une multinationale montpelliéraine, avec des gens au Canada, en Suède, en Pologne, etc. En effet, si la maison mère abrite quatre personnes à temps plein, le studio est adepte du télétravail et le reste de la clique est éparpillé un peu partout dans le monde. Pas de quoi effrayer le jeune développeur à se lancer dans un grand projet ambitieux, lui qui est plutôt habitué aux productions mobiles, avec ses Squids et Combo Crew.Initialement, le nom de code de Furi était Duels. Pratiquant la boxe à ses heures perdues, Emeric souhaitait retrouver les sensations d’excitation, d’appréhension voire de peur que l’on peut ressentir avant de monter sur un ring. Les petites séquences calmes de transition avant chaque combat du jeu sont là pour ça, en plus de faire respirer le joueur et ses doigts meurtris.
Les inspirations côté jeu qui viennent naturellement à la bouche d’Emeric sont bien évidemment les jeux de boss fight, par exemple Shadow of the Colossus ou Super Punch Out, mais aussi les jeux Platinum et plus généralement les beat them all japonais pour leur côté dynamique. Mais conscient de ses moyens et de sa taille, plutôt que de superposer les strates de gameplay en ajoutant de l’aventure, du RPG ou de l’exploration, la décision a été prise de se concentrer uniquement sur le combat brut contre divers boss, avec des contrôles simples et un jeu reposant uniquement sur le skill, l’apprentissage et donc la progression du joueur, et non de son personnage.
Une fois que l’équipe de 15 personnes a pu se focaliser sur le coeur du gameplay, la quintessence de l’essentiel, il a fallu l’enrober. Encore une fois, pas par d’autres strates de gameplay, non, mais un enrobage aussi bien visuel que sonore. Et pour ce faire, The Game Bakers a eu la bonne idée d’investir un montant conséquent dans un character designer de renom, Takashi Okazaki (Afro Samuraï), ainsi que sur des compositeurs de synthwave bien en vogue, comme Carpenter Brut, Danger ou encore The Toxic Avenger.
Outre le cachet de ces artistes externes, l’investissement a également été lourd dans le processus de création. En effet, l'exercice a été fastidieux pour Emeric et ses acolytes pour que le travail à distance fonctionne. Voici grosso modo le process qui a été utilisé pour chacun des boss du jeu :
- Envoi d’un brief et d’un concept de boss à Takachi
- Retour de Takashi avec un chara design
- Game Bakers adapte le concept et réalise un proto d’une arène
- Envoi au musicien de captures vidéo du proto et du brief final du personnage
- Le musicien choisi pour ce boss envoie une première version du morceau original
- Game Bakers réadapte en fonction de la musique et finalise le tout.
Les playtests et le debug ont par ailleurs permis d’ajouter du contenu en fin de prod. En effet, voyant les testeurs et divers joueurs commencer à se tirer la bourre sur les boss, les développeurs se sont dit que ça serait con de ne pas intégrer une feature qui permette d’apporter un composante multi, via un comparateur d’e-pénis intégré au jeu. En partenariat avec les fous furieux de Nesblog, The Game Bakers a donc intégré un mode speedrun au dernier moment. Une feature qu’on débloque une fois le jeu terminé une première fois et qui ne vient pas parasiter le coeur du gameplay.
On aime ou on aime pas, mais Furi semble être l’exemple d’une prod bien menée pour un studio de petite taille.
En se concentrant sur un gameplay unique sans artifice, en l’enrobant d’éléments externes venant le sublimer - et non pas le dénaturer, The Game Bakers semble avoir trouvé la formule gagnante. Le futur du studio dépend d’ailleurs des résultats du jeu : si les ventes sont bonnes, ils pourront autofinancer leur prochain projet. Sinon, il faudra partir à la pêche aux éditeurs.